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Sybel raconte, d’après un récit verbal de Werthern, que le prince Antoine aurait ajouté : « C’est seulement au cas où le gouvernement espagnol me convaincrait que l’empereur Napoléon III et le roi Guillaume seraient d’accord sur l’accession de mon fils au trône, qu’il me serait possible de soumettre la question à un examen plus approfondi. » Il eût été, en effet, tout naturel qu’un homme aussi avisé que le prince Antoine eût subordonné tout examen de la question à une entente préalable entre le chef de sa famille, le roi de Prusse, et le voisin de l’Espagne, l’empereur des Français. Mais il était inadmissible que lui, membre soumis de la famille royale de Prusse, laissât à un gouvernement étranger le soin d’intervenir dans une affaire qui devait être traitée directement par lui seul avec le chef de sa famille. Cette condition, en réalité, n’a pas été posée, car elle eût été indiquée dans le journal du prince Charles où le moindre détail d’importance est noté. Du reste, elle n’aurait eu aucun effet pratique, puisque la première condition posée par Léopold équivalait à un refus, et que, évidemment, on ne pouvait promettre à ce prince l’unanimité en face de l’obstination de Montpensier et de ses amis. Salazar l’interpréta ainsi et considéra sa mission comme ayant échoué. Toutefois, avant de reprendre la route de l’Espagne, il pria le ministre prussien, son introducteur, d’essayer une nouvelle tentative. En effet, le prince Charles s’étant arrêté à Bade dans le voyage qu’il fit à Paris, Werthern l’y rejoignit et insista pour que la maison de Hohenzollern ne renonçât pas à une si belle couronne. L’intervention prussienne officielle apparaît ainsi dès les premières démarches en Allemagne : le ministre de Bismarck se montre l’associé actif de son agent secret espagnol.


III

Peu après le départ de Salazar, le 6 octobre, le prince Charles vint à Paris. L’Empereur, mieux portant, avait pu se