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la position de Passau, cette base de toutes les opérations militaires en Bavière. Khevenhüller transporta donc son quartier général à Pleinting, sur la rive droite du Danube. Il y dirigea toutes ses troupes disponibles, Marie-Thérèse lui ayant enjoint plusieurs fois de prendre l’offensive. Elle y tenait encore davantage depuis la conclusion des préliminaires de la paix avec Frédéric II, car c’étaient les territoires acquis en pays bavarois qui devaient la dédommager des nombreuses cessions accordées à la Prusse. Tous les préparatifs étaient déjà faits pour un mouvement en avant, et les troupes se tenaient prêtes à marcher, lorsqu’on apprit que l’ennemi avait reçu des renforts notables : le plan d’une campagne offensive fut de nouveau abandonné.

Dans le cours ultérieur de la campagne, Khevenhüller reçut l’ordre, par suite d’un mouvement en avant des Français vers la Bohême, de se rendre dans le Haut-Palatinat et d’y effectuer sa jonction avec l’armée de Bohême. Il dut ainsi quitter le pays qu’il avait conquis. Les troupes qu’il avait laissées en arrière, n’ayant pas su résister aux Bavarois, évacuèrent leurs positions, parmi lesquelles se trouvait Munich : elles se retirèrent à Schärding.

Le rapport que Khevenhüller adressa à la Reine le 28 septembre 1742 trahit sa mauvaise humeur et un profond découragement. « Mon ardeur pour le service et l’autorité de Votre Majesté Royale est tellement grande, — écrivit-il dans ce document, — qu’il m’est impossible de cacher ma peine relativement à ce qu’on n’a pris aucun de mes projets en considération au moment propice… Mais de nos jours, comme disait cet excellent Guy Starhemberg décédé, on ne veut faire la guerre qu’avec les mains, et on veut régler par des batailles les menues affaires. On se fie au bonheur, on se laisse aller à des compromis incertains, et l’on ne tient compte ni du temps, ni des circonstances pour savoir si une bataille peut se terminer avantageusement et devenir décisive, et on s’affaiblit donc et on se fait même battre ! Au surplus, un général qui ne procède pas ainsi n’est même pas estimé ! » Finalement, Kevenhüller conseille, car il voit désormais tout en noir, d’accepter les propositions françaises, c’est-à-dire de sacrifier la Bavière, Passau excepté, pour obtenir à ce prix la retraite des troupes ennemies. Marie-Thérèse, au contraire, ne perdit pas encore tout espoir, et le sort des batailles