Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 39.djvu/807

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA CONFÉRENCE DE LA HAYE

C’est aujourd’hui, samedi, 15 juin, que les plénipotentiaires de quarante-huit puissances se réunissent à La Haye en vue de poursuivre l’œuvre commencée, il y a huit ans, sur l’initiative de l’empereur Nicolas II. Conférence de la paix, disait-on en 1899, dans l’heureuse illusion d’un début mal défini : ce titre est-il encore de mise, après l’expérience de la première réunion, après les pourparlers qui ont précédé la seconde ? Ne vaut-il pas mieux d’ailleurs que de moindres espoirs préparent de moindres désillusions ? La circulaire russe d’août 1898, qui convia les puissances à la première conférence et dont on se rappelle l’intention généreuse[1], planait en pleine métaphysique. Or, des diplomates réunis autour d’une table de congrès sont rebelles par fonction à la métaphysique. On n’a donc pas fait à La Haye ce que le comte Mouravief avait annoncé qu’on y ferait ; et on y a fait beaucoup de choses qu’il n’avait pas prévues. Mais ce qu’on n’a point fait était précisément ce qui avait le plus séduit l’opinion ; et, à l’inverse, l’œuvre utile, bien que restreinte, qui y a été accomplie, ne pouvait avoir d’attrait pour elle. C’est l’écueil des grandes idées que de déchoir en se réalisant. La première conférence de La Haye a fini par une déception pour avoir commencé par une équivoque.

A la veille de la seconde, les risques de malentendus, pour être moins évidens, ne sont pas moins réels. D’abord, la conférence a de dangereux amis. Elle déchaîne l’enthousiasme d’un

  1. « Le maintien de la paix générale et une réduction possible des armemens excessifs qui pèsent sur toutes les nations se présentent dans la situation actuelle du monde entier comme l’idéal auquel devraient tendre tous les efforts de tous les Gouvernemens. »