Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 39.djvu/808

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

idéalisme ingénu et les passions d’une politique de surenchère. Elle est compromise à la fois par l’approbation d’honnêtes théoriciens qui la croient, pour le bien de l’humanité, plus puissante qu’elle n’est, et par celle d’anarchistes habiles qui en attendent, pour le mal social, une efficace action. Elle plaît aux ligues de la paix et aux syndicats de désarmement. Elle inquiète donc ceux qui ne partagent, ni la confiante sérénité des premiers, ni la manie ruineuse des seconds. Elle est d’autre part mal connue, et partant méconnue. On est tenté de lui demander ou trop ou trop peu. On oublie et ses origines et son programme et sa portée. Pour suivre avec fruit ses travaux, il convient de lui restituer sa physionomie véritable.


I

Ses origines d’abord. C’était pendant l’été de 1904. Tandis qu’en Mandchourie la guerre russo-japonaise fauchait par milliers des vies humaines, l’Exposition de Saint-Louis offrait un cadre admirable à la pacifique activité des peuples. Parmi les nombreux congrès qui se tinrent à cette occasion, figurait celui de l’Union interparlementaire. A l’issue de ses travaux, l’assemblée décida de demander au président des États-Unis de convoquer les puissances à une seconde conférence de la paix. M. Roosevelt fit bon accueil à ce vœu ; il s’engagea à y donner prompte suite ; et le 21 octobre, il adressa aux gouvernemens signataires de l’Acte général de La Haye du 29 juillet 1899 une circulaire pour leur proposer de se réunir en une nouvelle conférence. Parmi les questions que mentionnait cette circulaire, on trouvait celles des droits et des devoirs des neutres, de l’inviolabilité de la propriété privée dans les guerres maritimes, du bombardement des ports, villes et villages non fortifiés, celle enfin de la distinction à établir entre les différentes sortes de contrebandes de guerre. Assez rapidement, le gouvernement américain reçut les réponses des puissances. Toutes étaient favorables au principe de la réunion. Une seule, — c’était la Russie, — demandait que cette réunion fût ajournée, en raison de la guerre où elle était alors engagée. L’objection était trop légitime pour qu’il n’en fût pas tenu compte. L’idée de M. Roosevelt fut donc momentanément abandonnée. Et la guerre russo-japonaise, à la conclusion de laquelle il devait, quelques mois plus