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de la crème fraîche, que l’on baratte alors suivant la méthode usuelle. Le « beurre régénéré » est parfaitement pur, puisqu’il n’y entre aucun élément étranger, — la loi américaine est très sévère pour les fraudes de margarine, — et, quoiqu’il porte l’étiquette obligatoire de renovated butter, il n’en est pas moins recherché pour son prix, plus modeste que celui des qualités de choix.

Aux fruits, si abondans sur le territoire de l’Union, les wagons-glacières ont ouvert, en toute saison, le marché le plus vaste. Aujourd’hui les pommes mûries le long du Pacifique viennent, sur la côte Atlantique, alimenter le Massachusetts qui, lui-même, exporte les siennes en Angleterre. Pommes, pêches ou oranges eussent été de nul prix sans un système efficace de transport. Le service des trains à fruit, les « fruit-express cars, » ont converti de vastes surfaces improductives en vergers dont les récoltes vont se distribuer dans tout l’univers.

La pêche de Californie est entraînée du producteur au consommateur, sur terre et sur mer, par une chaîne ininterrompue de glacières roulantes ou flottantes qui la préservent de toute avarie. Pour la première fois, en 1876, 300 caisses d’oranges partirent de San Francisco à destination de l’Est. En 1886, les expéditions représentaient 1 000 wagons ; elles en remplissaient 16 000 en 1896 ; aujourd’hui, les 10 millions de caisses d’oranges, estimées 135 millions de francs, exigent 33 000 wagons par an ; sans parler de 10 000 wagons de poires, de pommes et de pêches. Cet effectif californien ne correspond d’ailleurs qu’à une portion du trafic des fruits en Amérique. Les deux Carolines commençaient, il y a dix ans, par exporter 500 wagons de fraises ; elles en exportent maintenant 3 000. La Géorgie est passée dans le même temps de 700 wagons de pêches à 5 000 ; 20 millions d’arbres peuplent ses vergers.

Ç’a été un véritable problème à résoudre que celui de cueillir délicatement chaque fruit, sans que l’ongle les effleurât, — car une simple éraflure engendre une tache, et la plus légère plaie de l’épiderme, au départ, peut en cours de route, par un sourd travail, gâter le fruit tout entier ; — de détacher aussi chaque fruit au bon endroit, sans lui laisser une queue trop longue qui blesserait son voisin de boîte ; de refroidir des fruits cueillis par 30° de chaleur, assez vite pour arrêter en quelques heures leur maturation, et de faire régner dans les wagons réfrigérans une