difficile, qui ne demande pas seulement une fermeté intermittente, mais une patiente continuité dans l’action. Or, M. Clemenceau procède par impulsions successives et parfois contradictoires, apportant à reconstruire les mêmes procédés qu’il a employés longtemps à démolir et qui y étaient plus propres. Quelques mesures répressives, plus ou moins bien appliquées, ne restaureront pas la discipline dans nos armées de terre et de mer, et jusqu’au jour où la discipline y aura été restaurée, nous serons exposés à voir se produire des mutineries comme celle du 17e de ligne, et à apprendre tous les matins qu’un de nos cuirassés a été incendié ou qu’un de nos sous-marins s’est noyé. Certes, les leçons ne nous manquent pas depuis quelque temps. Si nous n’en profitons pas, nous serons bien coupables, ou plutôt bien criminels envers la patrie.
Par malheur, la discussion sur la libération anticipée de la classe de 1903 n’est pas de nature à nous rassurer sur l’énergie durable du gouvernement. Nous avons déjà parlé de cette affaire : M. le ministre de la Guerre y a pitoyablement changé d’attitude et de langage depuis le commencement jusqu’à la fin. Il est vrai qu’au début, l’insurrection du Midi ne s’était pas encore, produite, et c’est, si l’on veut, une demi-excuse pour lui : il a lui-même expliqué que, lorsque la question s’est présentée pour la première fois devant la Chambre, il avait cru pouvoir accepter la date du 12 juillet pour la libération de la classe, parce qu’il était à cent bleues de s’attendre à ce qui allait se produire. Il ne pouvait pas prévoir spécialement l’insurrection du Midi, soit ; mais, lorsqu’il s’agit d’arrêter une décision aussi grave, ne faut-il pas prendre des garanties contre tout ce qui peut arriver ? M. le général Picquart vivait donc, de son propre aveu, dans une sécurité absolue. Lorsqu’il regardait du côté du Midi, les immenses manifestations de Béziers, de Narbonne, de Nîmes, de Montpellier, déjà en pleine activité, n’apportaient à son esprit aucune inquiétude. Lorsqu’il regardait du côté de la frontière, l’horizon lui apparaissait d’une merveilleuse sérénité. Dès lors, quel inconvénient pouvait-il y avoir à libérer par anticipation la classe de 1903 ? Sur ces entrefaites, le Midi a fait explosion, et la loi est venue devant le Sénat. Alors, M. le ministre de la Guerre s’est mis d’accord avec la commission pour mettre dans la loi, non plus que la libération de la classe aurait lieu le 12 juillet, mais à partir du 12 juillet, ce qui n’était pas la même chose. Il restait maître, sous sa responsabilité, de choisir le moment le plus opportun pour libérer la classe en totalité ou en partie. C’était là une garantie : elle valait exactement ce que vaut le caractère