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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/539

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Il est encore un autre point qui m’a frappé. Vous faites observer très justement dans la préface que, dans l’amour que vous professez de tout temps pour les institutions libres, vous n’êtes séparé de ceux qui ne les croient pas praticables que par la différence du mépris qu’ils ont et que vous n’avez pas pour vos concitoyens. Il me paraît très difficile de pouvoir qualifier d’institutions libres la mécanique plus ou moins compliquée que l’on superpose à une société comme la nôtre pour la faire mouvoir. Un peuple qui, avec la République, le gouvernement représentatif ou l’Empire, conservera toujours pieusement un amour immodéré pour l’intervention de l’Etat en toutes ses affaires, pour la gendarmerie, pour l’obéissance passive au collecteur, au voyer, à l’ingénieur, qui ne comprend plus l’administration municipale, et pour qui la centralisation absolue et sans réplique est le dernier mot du bien, ce peuple-là, non seulement n’aura jamais destitutions libres, mais ne comprendra même jamais ce que c’est. Au fond, il aura toujours le même gouvernement sous différens noms, et puisqu’il faut qu’il en soit ainsi, mieux vaut que ce gouvernement, toujours le même en principe, soit, dans la pratique, aussi simple que possible. Vous rappelez-vous le temps où j’avais l’honneur d’être auprès de vous dans votre cabinet des Affaires étrangères ? Est-ce que le métier que nous faisions était beau ? Quand l’Europe entière en combustion réclamait votre travail de jour et de nuit et qu’il fallait tout laisser pour répondre à une interpellation de M. Savoye, qu’est-ce que la liberté publique gagnait à cela ? Quand les Autrichiens menaçaient le Piémont de la rupture de l’armistice et d’une marche sur Turin, et que vous écrivîtes cette belle et courageuse dépêche que je ne saurais oublier, ne vous al tendiez-vous pas à être parfaitement désavoué par la majorité de l’Assemblée et obligé de vous retirer ? Qu’est-ce que la liberté ou l’honneur du pays gagnait à une pareille forme de gouvernement, si ce n’est que les exigences les plus funestes de la tactique parlementaire, c’est-à-dire les questions de personnes les plus étroites, bien autrement étroites que les plus mesquines susceptibilités royales, se cachaient derrière une responsabilité collective, c’est-à-dire l’absence de responsabilité ? Il y aurait eu deux Chambres au lieu d’une que c’eût été la même chose, et n’en déplaise à M. d’Haussonville, il y a plus à reprendre qu’il ne dit dans la politique étrangère du règne de Louis-Philippe. Je ne vois nul