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une preuve complète et sans réplique, et le fait est qu’il est difficile de croire que Dieu se fût amusé à créer deux espèces si semblables et si voisines qu’elles pussent se confondre de manière à effacer complètement la ligne de démarcation qu’il avait tracée entre elles : ce qui arriverait si elles pouvaient donner des produits communs qui finiraient par prendre la place des deux espèces originaires. Flourens fait remarquer avec raison que ce signe secret de la reproduction annonce l’unité d’espèce chez les animaux à travers les plus grandes dissemblances de formes, tandis que les plus grandes ressemblances de formes n’indiquent rien sur ce point quand la faculté de reproduction manque. C’est ainsi que le bouledogue et la levrette de manchon, quoique deux animaux d’un aspect si différent, se reproduisent, tandis que l’âne et le cheval qui se ressemblent au point de se confondre presque à l’œil ne peuvent faire qu’un mulet improductif.

L’homme suivant Buffon et Flourens est donc d’une seule espèce et les variétés humaines sont produites par trois causes secondaires et extérieures : le climat, la nourriture et la manière de vivre.

La seule portion de ce chapitre qui me paraisse appartenir en propre à Flourens est une dissertation sur le réseau muqueux noir qui se trouve sous l’épidémie des nègres et qui a fait dire à Voltaire : La maladie des systèmes peut-elle troubler l’esprit au point de faire dire qu’un Suédois et un Nubien sont de la même espèce, lorsqu’on a sous les yeux le reticulum mucosum des nègres qui est absolument noir et qui est la cause évidente de leur noirceur inhérente et spécifique ?

Or, il résulte des observations faites par Flourens que cette même matière qu’il appelle couche pigmentale existe, avec une couleur moins foncée, chez l’homme rouge d’Amérique, qu’on la retrouve encore moins prononcée, mais très visible chez le Kabyle, le Maure et l’Arabe qui sont de la race blanche et que même on en aperçoit un germe dans l’Européen.

Je vous remercie des détails intéressans que vous me donnez sur l’Allemagne. Je n’ai pu encore, toujours à cause de ma révolution intérieure, m’informer de l’existence de traductions. Sans traduction, c’est pour moi lettre morte. S’il vous vient d’autres idées à l’esprit et d’autres livres à la mémoire sur le même sujet, vous m’obligerez de me le dire. Remarquez que c’est encore moins les causes qui avaient produit un état révolutionnaire des