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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/648

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dérisoires des ouvrières, les femmes américaines constatèrent, entre autres choses, que les vêtemens tout faits transmettaient très souvent les maladies épidémiques, en particulier la scarlatine et la tuberculose. Voici quelques faits révélés par les enquêtes.

Durant l’année 1900, parmi les familles d’ouvriers que soignait le dispensaire pour femmes et enfans de New-York, cent soixante-dix-neuf étaient occupées à faire des vêtemens. La maladie la plus répandue était la tuberculose.

Miss Lilian D. Vald, directrice d’une association de nurses, déposa ainsi :

« Nous appelons la phtisie le mal des tailleurs : les gens de nos quartiers travaillent presque tous à la confection de vêtemens et aucun d’entre eux ne me semble avoir échappé à la tuberculose… L’autre soir, je fus appelée dans un logis où déjà une nurse avait été appelée successivement pour trois malades appartenant à des familles différentes. Une de ces familles, atteinte de la tuberculose, avait déménagé, et, quelques mois après, nous venions soigner un nouveau malade qui succombait du même mal dans la même chambre… Il nous est arrivé bien souvent de trouver des ouvriers occupés à coudre des vêtemens dans une chambre où régnait la fièvre scarlatine ; il y a quelques jours, une de nos nurses alla voir trois enfans atteints de cette maladie : la mère travaillait à des manteaux de dames. Quand elle s’interrompait de coudre pour soigner les enfans, la mère déposait son ouvrage sur leur lit. »

Le docteur Hermann M. Bigg fit recueillir des poussières dans divers logemens d’ouvrières en vêtemens, sur les murs, les moulures ou les plafonds. La plupart de ces poussières contenaient des bacilles qui, injectés à des animaux, déterminèrent la tuberculose. Or, les trois quarts des vêtemens exportés par la ville de New-York, — et elle en a exporté en 1899 pour 100 millions de dollars, — avaient été confectionnés dans les logemens où l’enquête de M. Hermann Bigg était menée.

Comment remédier à un pareil mal ? Il semble que la difficulté de la tâche devait décourager à l’avance tous les efforts. Il n’en fut rien. Huit États ont déjà édicté une législation spéciale pour les ateliers en chambre. Ceux-ci doivent être autorisés par les inspecteurs du travail, qui les visitent, et peuvent les fermer en cas d’insalubrité, de surpeuplement et de maladie