rivalité pour attirer chez elle les enfans déchaînait des luttes confessionnelles ; et certes elles furent acharnées dans certains villages. Mais, vu l’incrédulité des Malgaches, ces querelles auraient été sans grand inconvénient politique, et un militaire déterministe eût pu y voir précisément l’exutoire aux impulsions belliqueuses de peuples récemment soumis : il y avait lieu alors de laisser les missions se développer librement suivant leurs forces. Mais la rivalité confessionnelle se compliquait gravement de celle des influences française et étrangère, les pasteurs protestans étant le plus souvent Anglais, et pouvait constamment donner lieu à des incidens diplomatiques. Il ne saurait y avoir à Madagascar de péril religieux, cela y est reconnu de tous : il ne peut y avoir qu’un péril étranger.
La compétition des missions catholiques et des missions protestantes à Madagascar s’est poursuivie jusqu’en Europe où elle a provoqué des discussions au Parlement et des campagnes dans la presse ainsi que des ouvrages de polémique, dont le plus répandu est l’Enseignement primaire à Madagascar de M. Raoul Allier, ouvrage clair et méthodique qui fait autorité dans les milieux libéraux et universitaires. Cet humaniste protestant, attaquant les catholiques avec une partialité assez évidente, y demande si « oui ou non, il y a lieu de vivre perpétuellement dans les transes à la pensée que des missions anglaises ou norvégiennes sont établies à Madagascar, » et l’exagération même des termes dans lesquels la question est posée, obligerait tout voyageur à y répondre par une négative dont se prévaudrait M. Allier. C’est un des problèmes auxquels nous avons consacré sur les lieux l’étude la plus scrupuleuse. Les protestans ont fait valoir que, depuis la guerre, des pasteurs français avaient remplacé en plusieurs endroits les envoyés de la London Missionary Sy et qu’il serait indigne de penser qu’ils peuvent travailler pour l’Angleterre contre leur patrie parce que leur religion est la religion officielle de l’Angleterre, et l’on a cité des fragmens de sermons imprégnés du plus pur républicanisme. Il nous semble indéniable que les pasteurs sont d’excellens républicains et quelques-uns sont même de loyaux Français, mais tous ont de la répulsion pour l’Etat français et il est un grand nombre de cas, dans une colonie, où, en croyant parler seulement contre un gouvernement, on agit contre le pays qui l’a institué. Au reste, ils ont tort de se plaindre d’avoir été systématiquement persécutés,