rechercher, même à un prix assez rémunérateur. Au lieu d’abandonner tout ce qui subsiste de l’art indigène, jugé inférieur et fruste par les commis de l’administration, il faut emprunter aux admirables lambas nationaux les motifs décoratifs particulièrement aptes à servir de modèles pour les entre-deux et pour des plumetis mélodiquement nuancés, où s’associent luxueusement les ressources esthétiques des combinaisons géométriques et des tons gradués en gammes ; les pierres et les lits sculptés ou les poteaux mortuaires offrent des dessins d’ornementation dont la ligne sauvage ferait excellemment valoir les tons écrus, ou teintés des couleurs fortes de nate et de manguier, des fils indigènes. Les araignées séricigènes abondent à Madagascar et aux Mascareignes et le gouvernement supputait l’attrait que les mondaines auraient à porter de la dentelle de soie d’araignée, tissée suivant des modèles qui manifesteraient la provenance exotique : or, c’est à un ancien sous-officier qu’il confia le soin d’étudier quel parti on en pourrait tirer, et la première chose à quoi il ait songé, ç’a été qu’il pouvait, après les avoir mises en cage, changer radicalement leur nourriture : ignorant les plus élémentaires travaux de la science contemporaine sur la coloration des insectes, il ne soupçonnait pas un instant qu’il y eût là de quoi peut-être faire perdre à la soie son incomparable coloration d’or mielleux. C’est encore à lui qu’il revenait d’essayer et d’estimer les diverses terres à poterie, les minerais, les couleurs, les essences autochtones, la valeur des textiles inconnus. Voilà une grande colonie qui dépense des sommes considérables pour la création d’industries locales, et qui n’a pas un seul chimiste ni le moindre préparateur d’histoire naturelle pour étudier scientifiquement les ressources du pays, alors que la moindre maison allemande, pour spéculer à nouveau sur des produits minutieusement analysés, s’attache des savans auxquels l’industrie germanique doit son extension.
Quant à l’enseignement agricole, il n’existe guère en réalité. Il est cependant plus pressant de préparer l’exploitation agricole que l’exploitation industrielle de Madagascar. Celle-ci, fatalement, tend à dépeupler les campagnes ; celle-là seule empêchera les déclassés de pulluler dans les villes, pour la démoralisation et le vol. Il ne s’agit point évidemment d’initier seulement les Malgaches à la culture rationnelle des céréales comme on y songe, mais de leur apprendre à entretenir les prairies, à soigner