Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/859

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


IV

Nous avons montré que l’évolution progressive de l’association a eu pour tendance constante la liberté, se traduisant par la substitution du contrat au statut. Nous avons ensuite constaté que l’association se manifeste actuellement et doit de plus en plus se manifester sous un état de droit que nous avons dénommé la délégation civile[1], pour le différencier de celui de la personnification civile. Il nous reste à exposer les conséquences importantes qui résultent de la présence d’un contrat comme loi des parties dans toute association.

Faisons remarquer tout d’abord que l’obligation de passer contrat suffit à assurer la limitation de durée de l’association, toute convention sans détermination de durée étant nulle par le fait, puisqu’elle peut prendre fin à n’importe quel moment, et avant même qu’elle ait commencé à produire ses effets.

Sous ce régime, toutes les associations devront se conformer aux conditions de validité de tout contrat, à savoir : consentement et capacité des contractans ; objet nettement déterminé ; cause licite dans l’obligation.

On aperçoit les avantages d’ordres divers qui résultent,

  1. Au cours de l’exposé qu’ils firent au Sénat de Belgique de notre théorie et formule d’organisation des groupemens professionnels. MM. Paul Janson et Dupont préférèrent se servir du terme : existence civile, dont ils proposaient l’introduction dans la loi en discussion. Quelle que soit notre déférence envers les avis de ces jurisconsultes, nous avons cru devoir maintenir le terme : délégation civile, qui, à la fois, dénomme de façon précise l’être moral et définit de façon complète son état de droits.
    Les deux fictions — « corporation », et « société », — par lesquelles se manifeste l’association, jouissent, d’ailleurs, de ce que l’on peut appeler l’existence civile ; or, il importe, selon nous, de marquer la différence essentielle qui caractérise, d’une part, la fiction « corporation, » dont l’existence et le fonctionnement résultent de la personnification civile, c’est-à-dire de pouvoirs que cette fiction possède en elle-même et dont l’un est de se perpétuer, et d’autre part, la fiction « société, » dont l’existence et le fonctionnement résultent d’une simple délégation temporaire.