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longtemps encore exposée à la vénération de ses fils spirituels.

Je disais tout à l’heure que l’Eglise nationale protestante ne s’était pas attardée à de vaines récriminations. Et en effet, dès le 2 juillet, soit deux jours après la votation populaire, le consistoire décidait de réunir une assemblée consultative pour nommer une commission avec mandat de rédiger un avant-projet de constitution. Cette assemblée, à laquelle avaient été convoqués les membres, — 25 laïques, 6 ecclésiastiques, — du consistoire, les 36 membres de la Compagnie des Pasteurs et 42 délégués des conseils de paroisse, s’est réunie dans le temple de l’Auditoire, sous la présidence de M. Edouard Bordier, président du consistoire. Après lecture de divers rapports, l’un des dix-sept pasteurs séparatistes, M. Gambert, a pris la parole pour justifier son attitude et celle des co-signataires de l’appel du 21 juin.

La loi Fazy, a-t-il dit notamment, « nous apparaissait comme respectueuse des droits de la conscience religieuse et offrant à l’Eglise l’occasion favorable d’accepter un changement constitutionnel que réclamaient pour des raisons diverses la majorité de nos concitoyens. » Et encore : « Pas plus que l’union avec l’Etat, la séparation d’avec l’Etat ne constitue l’Eglise. » Il est vrai. La constituante élue par l’assemblée de l’Auditoire comprend 19 membres, soit 6 laïques représentant le consistoire, 6 ecclésiastiques désignés par la Compagnie des Pasteurs, 7 délégués des conseils de paroisse. Son président est M. Cramer-Micheli, ancien président du consistoire, antiséparatiste. Mais elle sera vice-présidée par un séparatiste très ardent, précisément par ce pasteur Gambert, dont je viens de citer le discours courageux.

C’est ainsi que séparatistes et antiséparatistes sont appelés à travailler ensemble à la réorganisai ion de l’Eglise séparée de l’État. Tous semblent vouloir à tout prix maintenir l’unité du protestantisme genevois, et la crise que traverse le protestantisme français suffirait au besoin à les convaincre de la nécessité d’un sérieux effort pour sauvegarder cette unité. Il est probable, il est même certain, si l’on en juge par l’opinion unanime qui s’est affirmée à l’Auditoire, que la constituante voudra conserver le caractère national de l’Eglise où toutes les tendances continueront donc d’avoir droit de cité. Il y aura à sa base, non pas une confession de foi proprement dite et