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la Bank of Egypt limitaient leur activité à des opérations de change et d’avances sur marchandises qu’elles pratiquaient avec la plus grande circonspection. En dehors des prêts sur gage mobilier consentis par les banques, et abstraction faite de l’usure qui éprouvait cruellement les fellahs, le seul crédit usité était le crédit hypothécaire que dispensait parcimonieusement le Crédit foncier égyptien. Il est facile de comprendre que cette disproportion entre les opérations engagées et les ressources immédiates, qui est la cause de toutes les crises économiques, ne pouvait alors se réaliser. Faute de crédit, chacun n’entreprenait rien au-delà de ses disponibilités.

Vers 1896, l’essor économique de l’Egypte commença à se dessiner. Depuis quatorze ans, ce pays jouissait d’une bonne administration ; ses finances avaient été restaurées, son système d’irrigations réparé et complété.

C’est alors que l’attention des financiers étrangers commença à se fixer sur une région fertile et peuplée, arrêtée dans son développement par le manque des capitaux nécessaires à l’amélioration de ses terres et à l’assainissement de ses nombreux centres urbains. À ce même moment, le gouvernement britannique décida inopinément de reconquérir le Soudan : il affirmait ainsi, pour la première fois, sa volonté formelle de prolonger indéfiniment l’occupation de l’Egypte. Ce fut le signal de la constitution de plusieurs sociétés anonymes anglaises ou belges destinées à exploiter des terrains de culture, à construire des chemins de fer d’intérêt local, des tramways à Alexandrie et au Caire. En 1898-1899, une hausse très forte du coton égyptien, coïncidant avec les bonnes dispositions des marchés financiers européens et avec l’impression favorable produite en Angleterre par le succès de l’expédition du Soudan, provoqua un brusque mouvement de spéculation et amena la formation de plusieurs nouvelles sociétés. On vit ainsi, en l’espace de trois mois, les actions de la National Bank, établissement qui venait d’être fondé sous les auspices du gouvernement, avec le privilège d’émettre des billets de banque, passer de onze livres à dix-huit, alors que le Conseil d’administration n’avait pas encore eu le temps de faire choix d’un local. Toutes les autres valeurs haussèrent, sans plus de raison, dans la même proportion. De nouveaux titres furent émis, en vue de profiter du mouvement et de réaliser une forte prime aux dépens du public.