Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 41.djvu/337

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il avait tout de suite compris qu’il avait dans cette compagne d’élite une amie, la meilleure des confidentes et des conseillères. Les lettres souvent charmantes qu’il lui écrivit ont pour nous cet intérêt incomparable, que Lamartine s’y exprime avec plus de confiance encore et plus de naïveté que dans ses lettres à ses amis, si sincères pourtant et d’une si belle franchise ! C’est la pensée saisie à l’instant où elle jaillit du cerveau et fixée tout uniment, sans détours, sans réticences et sans nuances. C’est l’impression du moment jetée toute vive sur le papier. Ces lettres qui se réfèrent, comme il est naturel, à des époques délicates de la vie de Lamartine, nous renseignent jour par jour, heure par heure. On peut compter sur Mme de Lamartine pour les avoir conservées précieusement. M. Charles de Montherot, petit-neveu de Lamartine, a bien voulu ouvrir pour nous les malles de Saint-Point où dormait cette correspondance. Le public y a gagné déjà de connaître les délicieuses Lettres à la fiancée. En publiant quelques-unes des lettres de la période qui suivit le mariage du poète, nous n’oublierons pas que notre seule excuse à pénétrer dans l’intimité d’un écrivain est par là d’arriver à mieux comprendre le caractère de ses œuvres et à on sentir plus vivement les beautés. C’est aussi bien l’intérêt que nous aurons à suivre Lamartine de l’époque des Méditations à celle des Harmonies.


UN DIPLOMATE EN CONGÉ

Nous avons, dans une précédente étude[1], laissé Lamartine sur la route de Naples. L’été qu’il passa, auprès d’une femme aimée d’amour, soit à Naples même, soit dans l’île ravissante d’Ischia, fut un pur enchantement. La mauvaise saison fit surgir des difficultés imprévues. On savait que la santé toujours précaire du poète recommença de s’altérer et qu’il fut repris de ces douleurs qui le torturèrent toute sa vie. On devine maintenant des ennuis d’un autre ordre. Il n’y avait à Naples aucune société, pas une personne avoir : excellentes conditions pour deux amoureux. Mais les jeunes mariés avaient emmené avec eux Mme Birch. L’excellente dame, éloignée de ses habitudes, sans relations, peu sensible aux beautés du paysage, et qui n’avait pas les

  1. Voir dans la Revue des 15 août et 1er septembre 1905 nos articles sur le Mariage de Lamartine.