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répugnance : il ne céda ni aux pressans appels des patrons de sa candidature, ni au courroux de son père. Il s’était juré de ne pas s’exposer une seconde fois aux humiliations dont il avait gardé l’amer souvenir : il se tenait parole. Il fut élu le 5 novembre.

Il n’avait pas voulu solliciter ses juges ; mais il convenait qu’il remerciât ses nouveaux confrères. Il arriva à Paris sans tarder. C’est pendant son absence que sa mère allait mourir à Mâcon. Elle succomba à des brûlures qu’elle s’était faites au bain. Sa belle-fille, qui était auprès d’elle, n’osa pas annoncer tout de suite l’affreuse nouvelle à Lamartine. Elle lui écrivit une lettre afin de le préparer, en même temps qu’elle priait Virieu de choisir son moment pour lui dire toute la vérité. On a inséré dans la Correspondance du poète les deux lettres que Mme de Lamartine adressait à Virieu les 18 et 19 novembre, toutes pleines de recommandations minutieuses et si touchantes ! Elle en avait joint une pour son mari contenant tous les détails des dernières heures. Les quelques billets qui vont suivre, tracés à la hâte par Lamartine, nous font assister aux pénibles scènes, et nous rendent témoins de son émotion. Il est précisément à l’une de ces minutes où la destinée semble ne plus vouloir que sourire. Il vient d’être élu : il subit la griserie du succès et des félicitations. Les premiers billets sont d’un ton exceptionnellement joyeux.


13 novembre, 1829.

J’arrive en bonne santé et sans accident. J’ai déjà, depuis huit, jours, trente visites par jour. Je n’ai vu qu’Alain. Les journaux sont pleins de choses flatteuses et même trop flatteuses, insolentes pour l’Académie. — Virieu est à Paris. — J’ai un charmant logement et une voiture pour moins me tuer. Adieu.

Ton Alphonse.


15 novembre.

Ma chère Marianne,

Ma première et dernière pensée du jour sont à toi. Tout va bien. Je cours du matin au soir et voudrais pouvoir arrêter l’aiguille des pendules pour avoir plus de temps. Les distances en mangent trop à Paris. J’ai dîné hier chez M. Lainé, qui est plus joyeux que moi. Il n’a pas dormi de quatre jours. Je verrai le prince de Polignac demain…


Puis voici les mauvaises nouvelles qui arrivent graduellement :