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ouvrières devint la condition sine qua non pour demeurer dans le giron de l’Église (Londres, 1896).

Ils poursuivaient avec le même acharnement les théories et les méthodes anarchistes, dans la question de l’antimilitarisme et dans celle de la grève générale, proposées à ces congrès. La grève générale est le drapeau que les anarchistes opposent à la conquête électorale des pouvoirs publics. Mais elle est impuissante à renverser la société capitaliste, à fonder une société nouvelle. Si les ouvriers étaient assez bien organisés pour mener la grève à bonne fin, elle deviendrait inutile. Dans l’état actuel, elle ne pourrait dégénérer qu’en émeutes suivies de répressions sanglantes.

Le péril de gauche, l’agitation antiparlementaire des anarchistes une fois écarté de l’Internationale, un danger surgissait à droite, celui des ultra-parlementaires. Les partis socialistes, à mesure qu’ils augmentaient dans les parlemens démocratiques, en France, en Suisse, en Italie, voyaient leur alliance sollicitée par les radicaux bourgeois. Une participation au pouvoir leur était offerte. Ils apparaissaient dès lors, non comme un parti de lutte et de révolution, mais comme un parti de compromis, un parti d’alliance de classes, un parti de réforme, qui partageait le pouvoir avec la bourgeoisie au lieu de le conquérir tout entier pour le prolétariat. Par là, les socialistes encouraient la responsabilité de toutes les mesures répressives à l’égard de la classe ouvrière et de toute intervention dans les grèves en vue du maintien de l’ordre public : ils risquaient de s’aliéner leur clientèle et de la détourner de l’action politique au profit des anarchistes. Aussi le Congrès de Paris, en 1900, condamnait-il le millerandisme, sauf dans les cas exceptionnels ; et le Congrès d’Amsterdam, en 1904, à une faible majorité, exécutait le jaurésisme, inféodé au Bloc radical, qui n’était qu’un millerandisme atténué, avec les avantages de la candidature officielle et les bénéfices du pouvoir joints à une complicité moins apparente. Parmi les plus modérés des socialistes allemands eux-mêmes dans les États secondaires, en Bavière, en Wurtemberg, des velléités de déviations s’étaient fait jour, auxquelles le Congrès de Dresde avait tenté de mettre ordre.

De 1889 à 1904, les congrès internationaux avaient réussi à faire front contre l’impatience des anarchistes et des « arrivistes », qui menaçaient d’encombrer les partis socialistes des