en 1903, en Italie, en 1904 ; mais en Russie les grandes grèves de 1905 avaient porté à l’ancien régime un coup sensible. Quelle différence avec les socialistes en Saxe, qui s’étaient laissé prendre le droit de vote, sans remuer seulement le doigt !
Obligés de tenir compte de cette idée de grève générale qui commençait à hanter les jeunes générations ouvrières, les dirigeans de la social-démocratie allemande, à leurs derniers congrès, admettaient la grève contre un coup d’État, d’ailleurs invraisemblable, qui atteindrait le Reichstag. Ils désignaient cette grève sous le nom de grève politique des masses, der polilische Massenstreik, afin de la distinguer de celle des anarchistes, qui vise non à sauvegarder des droits parlementaires, mais à supprimer le Parlement. S’ils l’indiquaient comme moyen préventif, ils la répudiaient comme mesure offensive, en vue d’obtenir le suffrage universel en Prusse, si indispensable à la démocratisation de l’Allemagne. Ils en recommandaient l’étude, mais en interdisaient l’exécution. Cette timidité[1] jointe aux vicissitudes électorales était de nature à ébranler la foi dans la vertu souveraine des méthodes allemandes pleines de patience et de lenteur circonspecte.
Quels que soient les moyens employés, les succès électoraux des socialistes sont soumis à des fluctuations imprévues. Aux États-Unis, au pays des trusts, où le socialisme, si la théorie de Marx était vraie, devrait suivre pas à pas le développement du capitalisme, tes socialistes ont perdu un tiers de leurs voix d’une législature à l’autre, et ils ne comptent pas un seul représentant à Washington, en dépit de la propagande de leurs journaux et de leurs romans. En Angleterre au contraire, trente-deux membres du parti ouvrier ont fait irruption à la Chambre des communes, où Keir Hardie était jusqu’alors le seul défenseur de l’Internationale. Près de la moitié de ces députés se rattachent directement au socialisme. En Suisse, en Belgique, en Hollande, en Italie, des sièges ont été perdus ou n’ont pas été gagnés dans la représentation nationale. D’autres pays où les socialistes semblaient avoir peine à trouver un sol favorable, en Russie, en Finlande surtout, dans certains États balkaniques, dans certaines
- ↑ La lourdeur, le traditionalisme, l’absence d’ardeur révolutionnaire dans la social-démocratie allemande, sont encore attribuables à ce fait qu’elle fait vivre tout un monde d’employés, de petits fonctionnaires du parti qui ne songent qu’à conserver leur situation.