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l’unité et la fraternité des peuples[1]. Tels étaient la thèse et le problème assignés au Congrès de Stuttgart. Il siégeait parallèlement à la Conférence de La Haye et cherchait de même à obtenir une paix durable par des accords internationaux. M. Vandervelde disait solennellement à ce propos, avec moins de rudesse et autant de ridicule que le citoyen Quelch : « Les gens de La Haye savent parfaitement que la vraie conférence ne siège pas à La Haye, mais à Stuttgart. » On ne pourrait assez insister sur ce point, l’impérialisme prolétarien n’a rien du pacifisme bourgeois de M. d’Estournelles ; il est aussi belliqueux, et serait plus meurtrier, s’il parvenait à se déchaîner, que l’impérialisme capitaliste.

C’est à l’instigation des socialistes français, malgré l’opposition obstinée des social-démocrates allemands, que l’antimilitarisme fut mis à l’ordre du jour par le Bureau international, dans ses séances du 4 au 6 mars 1906.

À partir de 1889, la France est devenue un foyer de l’antimilitarisme, des attaques les plus audacieuses contre la discipline et contre l’armée. On y voit ceux qui invoquent la justice s’allier aux ennemis de toute loi et de toute justice, et les hommes au pouvoir, les socialistes, les anarchistes, travailler fraternellement à la ruine de l’autorité, au mépris des officiers, à la démolition de l’armée. Les André et les Pelletan se sont montrés dans cette entreprise les dignes précurseurs des Yvetot et des Hervé. Le mouvement n’a pas eu de peine à se répandre dans les classes ouvrières ; l’œuvre de « chambardement » a porté ses fruits. La Confédération générale du Travail s’est fait une spécialité de propagande antimilitariste et antipatriotique, et l’hervéisme gagne l’enseignement primaire, grâce au zèle des instituteurs dévoués à la cause.

Mais il n’est pas aisé de suivre cet exemple. La France est le seul pays où l’on crache impunément sur les officiers et sur le drapeau. Pour n’être pas souverainement dangereuse, au point de vue de l’internationalisme pur, cette propagande devrait être simultanée. Or elle n’a rencontré aucun écho en Allemagne. Bebel a exécuté sévèrement à Mannheim les contrefaçons de l’hervéisme que Karl Liebknecht tentait d’introduire dans le parti. Au moment aigu des affaires du Maroc, les Allemands se

  1. Vorwaerts du 14 juillet.