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300 kilomètres, dont un tiers environ est déjà achevé, il y a 10 kilomètres de viaduc en ciment armé, du prix de 1 560 000 francs chacun, 45 kilomètres de remblai et de rocailles le long de la côte marécageuse de Floride et 130 kilomètres de remblai en maçonnerie sur les îles. La voie est maintenue partout à 10 mètres au-dessus de la basse mer, hauteur jugée suffisante pour résister aux coups de vent et aux vagues. De temps en temps un pont d’acier laisse un passage libre à la navigation, car, à un certain point, la ligne enjambe un bras de mer de près de 5 kilomètres.

On le voit, par ces exemples qu’il serait oiseux de multiplier, si les Américains ont commencé par construire des chemins de fer « à l’économie, » comme ils ont commencé par faire de la culture extensive, ils ont passablement marché depuis. Tout en redressant les voies, tout en réduisant le degré des pentes et en allongeant le rayon des courbes sur des kilomètres de longueur, ils ont, depuis quinze ans, augmenté de 128 000 kilomètres leurs voies supplémentaires de garage et de secours ; ils ont remplacé presque tous les rails de fer — 96 et demi pour 100 en 1906 — par des rails d’acier d’un poids double.

Encore ces nouveaux rails de 50 kilos sont-ils trop faibles pour porter les nouveaux wagons. Lors d’une vérification toute récente, sur une grande artère, un Trunck line, 200 d’entre eux étaient trouvés brisés qui n’avaient pas six mois de service. C’est que les rails des États-Unis travaillent bien plus que ceux de l’Europe. Avec deux tiers de moins de voies doubles, les chemins américains manipulent deux tiers de plus de fret que les chemins de fer anglais. Il y passe donc beaucoup plus de wagons et surtout des wagons plus lourds. Depuis trois ans seulement les wagons de marchandises de moins de 15 000 kilos — ce qui est l’ordinaire des wagons français — ont été remplacés par des wagons de 50 000 kilos et plus : de sorte qu’un train de 6 wagons actuels représente 36 wagons du type de 9 tonnes, partout usité il y a vingt ans.

Cet accroissement du matériel, de sa capacité de transport et de traction, on peut s’en faire idée en parcourant le bilan des sociétés qui ont pour objet de le fournir. L’ « American locomotive » en 1902 faisait 132 millions de francs de recettes ; elle a fait, en 1906, 212 millions. Elle rivalise avec les établissemens Baldwin qui livrent une quarantaine de locomotives par