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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 41.djvu/672

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de 1850 et de 1860, on ne discute pas sur les principes fondamentaux qui régissent les rapports entre l’Église et l’État. La bulle De salute animarum de 1821 donne à la vie de l’Église prussienne des lois très générales, un cadre très sommaire, que l’Etat ne conteste point ; il s’est d’ailleurs obligé, par la Constitution de 1850, à respecter l’autonomie des diverses confessions, et c’est sur le terrain de cette Constitution, c’est-à-dire sur la base même proposée par l’État, que se place l’épiscopat lorsqu’il apporte ses griefs ou ses requêtes ; c’est sur ce terrain, encore, que se forme et qu’évolue, pour les soutenir et les faire triompher, le groupe parlementaire catholique. Tandis qu’ailleurs le statut de l’Eglise est indécis, flottant, sans cesse remis en question, et que ces litiges mêmes entretiennent une malveillance profonde contre l’ « ultramontanisme, » la Prusse nous offre le spectacle d’initiatives catholiques s’essayant sans relâche à grandir le prestige de l’Église et à augmenter ses libertés ; et de même qu’il faut se transporter au sud de l’Allemagne, — nous le constaterons dans un prochain article, — pour surprendre les premiers grondemens de l’esprit de Cullurkampf, de même c’est en Prusse que nous allons voir les catholiques, à la faveur de leur demi-sécurité, faire l’apprentissage d’une action politique sérieuse et savante.


I

Il fallait du temps et quelque violence sur elle-même pour que la royauté prussienne devînt constitutionnelle, et l’on pourrait encore se demander, aujourd’hui, si cette évolution est complètement achevée. La Constitution de 1850 n’empêcha pas Bismarck de gouverner contre la Chambre ; elle ne gêna pas une seule fois, entre 1850 et 1870, les initiatives autoritaires de la royauté ; on savait, lorsque besoin était, donner des coups de canif dans cet auguste papier. Mais, si déchiqueté fût-il, les catholiques, à de fréquentes reprises, s’en servirent contre les majorités parlementaires qui menaçaient l’autonomie religieuse. Tandis qu’en général les constitutions fraîchement octroyées opposaient une barrière à l’arbitraire des rois, ce fut plutôt, en Prusse, le caprice des députés, — leur caprice en matière religieuse, — qui trouva, dans la Constitution de 1850, une limite et une entrave ; et les catholiques du reste de