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d’année et une partie seulement des 6e, et 7e et 8e corps ; an total, 104 bataillons, 156 escadrons, 86 batteries (344 pièces), c’est-à-dire en infanterie 10 pour 100 seulement du total de nos forces. Nous allons voir l’importance de cette poussée manifeste des forces allemandes vers la frontière.

Il est fort possible, fort probable même, que les hostilités commenceront brusquement, sans aucune déclaration de guerre, peut-être sans une période préalable de tension politique ; et cette offensive brutale ne peut se produire que du côté de l’Allemagne dont le souverain, décidant à lui seul de la paix et de la guerre, peut déclencher, de sa propre autorité, le formidable engin qu’est l’armée allemande. Chez nous, par la Constitution même, le chef de l’Etat ne peut déclarer la guerre sans l’assentiment du Parlement, même pour répondre à une agression. De là résulte forcément pour nous un certain retard initial de mobilisation que l’on estime, en général, à vingt-quatre heures si le Parlement est en session ; que serait-ce dans l’intervalle entre les sessions ? Ceci permet à l’Allemagne de troubler d’une façon sérieuse nos premières opérations et de livrer la première bataille dans des conditions particulièrement avantageuses pour elle. Voici comment, en effet, on peut concevoir l’offensive brusquée de nos voisins de l’Est. Les premiers échelons de leurs troupes de couverture, au lieu d’être maintenus sur la défensive, seraient portés immédiatement en avant sur le territoire français, et agiraient offensivement contre notre couverture. Jusqu’alors il n’y aurait pas grand danger pour nous : 1° si nos effectifs de couverture sont à leur chiffre normal, 2° si les forces d’invasion sont réduites aux premiers échelons des troupes de couverture. Mais, du fait même du retard initial que nous devons subir, les Allemands sont en mesure de faire suivre immédiatement ces premières troupes des effectifs de paix de toutes les unités qu’ils peuvent amener à la frontière par les voies ferrées pendant les heures d’avance qu’ils ont sur nous, c’est-à-dire par les troupes qui, n’étant pas éloignées de plus de 200 kilomètres de la frontière, peuvent l’atteindre en quatre ou cinq heures de trajet en chemin de fer. L’équilibre est alors assez gravement rompu à notre détriment.

Précisons. Supposons que l’empereur d’Allemagne, décidé à prendre contre nous, sans avertissement préalable, une offensive brusquée, veuille attaquer le 2 du mois. Dès le 1er au soir,