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bataillons, 68 escadrons et 112 batteries (1er échelon), ce qui demande au maximum 100 trains. Si nous comptons encore une vingtaine de trains pour les escadrons venus de l’intérieur, ce sont, en définitive, 180 trains à amener en vingt-quatre heures. Cet effort serait-il trop considérable pour les lignes allemandes, surtout si le haut commandement a prévu et préparé le mouvement ? Certes non. Par exemple, l’écoulement des grandes garnisons de Strasbourg, de Coblentz et de Trêves demanderait au plus respectivement 16, 5 et 7 trains. Où voit-on là une impossibilité ? — « Comment marcher à l’ennemi, a dit aussi le ministre, si l’on n’a pas ses effectifs de guerre ? » Nous avouons ne pas comprendre l’objection. Dès les premières marches, après chaque combat, les effectifs de guerre sont incomplets ; il est aussi facile de concevoir la marche en avant d’une unité composée de son premier échelon au début de la campagne que celle d’une troupe qui a éprouvé des pertes au cours de cette campagne. L’arrivée des deuxièmes échelons est assimilable à l’arrivée de renforts envoyés de l’arrière à une troupe dont les effectifs ont été réduits. Du reste, l’adversaire à combattre est exactement dans les mêmes conditions. N’est-ce pas avec des effectifs incomplets que notre couverture se porte à son poste de combat en vue de la défensive ; pourquoi ne le ferait-elle pas aussi bien en vue de l’offensive ? Mais « comment affronter une bataille quand on n’a pas à sa disposition la quantité énorme de munitions qui sont nécessaires avec les armes modernes ? » Rien n’est plus simple que de constituer à l’avance de forts dépôts de munitions dans les villes de la frontière ; dès lors, le ravitaillement des troupes peut se faire d’une manière continue et abondamment, puisqu’un réseau serré de voies ferrées amènerait les trains de ravitaillement presque sur le champ de bataille. Un seul train militaire, chargé de 200 tonnes de poids utile, porte 20 000 coups de canon ; on voit donc qu’il n’y aurait aucune difficulté pour alimenter la ligne de feu. Le réapprovisionnement en vivres serait tout aussi facilement assuré[1] ; il suffirait de quelques voitures de réquisition que l’on trouverait sans peine dans un pays riche dont les ressources n’ont pu être enlevées, pour relier les corps de troupe aux gares voisines. En définitive, les ravitaillemens de toute

  1. Aux grandes manœuvres de cette année, les Allemands, à titre d’essai, ont fait parvenir aux troupes le pain et la viande, par chemin de fer, presque sur le champ de bataille. N’est-ce pas là un indice de leurs intentions ?