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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 41.djvu/865

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étant arrivés dénués de connaissances exactes, se sont aussitôt fait envoyer au Japon, au Brésil, à la Jamaïque, au Cap, à Java, et à Sumatra. On ne peut que les louer d’avoir voulu s’instruire, mais ils eussent pu le faire à moins de frais de représentation. De plus, ils se rendirent dans ces pays avant même d’avoir exploré leur colonie de façon à se rendre compte de sa nature et de ses besoins et sans avoir appris le hollandais ni l’anglais ; au retour, une année ne s’écoulait pas qu’ils n’eussent déjà publié des livres sur l’agriculture à Madagascar.

Il échut à ces fonctionnaires de parade de créer des stations d’essai. La plus connue est celle de Nanisane, près Tananarive ; elle a été installée décorativement dans le parc du Premier Ministre, mais la terre y est si ingrate que tout y a péri, malgré des soins assidus et la dépense de quelques centaines de mille francs. C’est le lieu des pèlerinages mélancoliques ou satiriques des Tananarivois, toujours en quête de plaisanteries amères où dénigrer le gouvernement. On y arrive à travers des « périmètres de reboisement » où se distinguent avec peine, au milieu des herbes brûlées par le soleil, quelques filaos rôtis ; les pépinières de fruitiers ne montrent guère que quelques pêchers ; l’herbe même y est désolée, le potager seul prospère. La station est en même temps une école supérieure, l’École pratique d’Agriculture et de Sériciculture, où des contremaîtres venus du Gard obtiennent de bons résultats de leurs élèves hovas ; mais il ne s’y trouve point de laboratoire d’analyses. Elle prétend à former des jardiniers et à les imposer dans les provinces aux administrateurs, par une jalousie de direction universelle qui fait la joie de Madagascar, et subit partout des rebuffades. Elevant à Nanisane des moutons qui y périssent lamentablement, elle a voulu exercer son contrôle sur la ferme de l’Iboaka, dans le Betsiléo, où le service vétérinaire, modeste et intelligent, obtient le plus grand succès : celui-ci lui a montré avec fermeté qu’elle n’y avait nul titre. Elle s’est retournée vers les Eaux et Forêts et s’est plainte aigrement au Général (annexes du Rapport officiel de 1905) que ce service rival se permît de garder la propriété des quinquinas qu’il avait plantés ; les quinquinas ne dépendaient-ils pas naturellement de l’agriculture ? Déboutée de sa demande, elle a du moins pu affirmer sa direction sur les quarante-deux postes météorologiques de l’île : en réalité c’est le P. Colin, directeur de l’observatoire de Tananarive, savant universellement estimé, qui