Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 41.djvu/897

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le discrédit reste attaché dans leur pays au nom de Madagascar. On a détourné la grande émigration des Boërs et l’on n’a pas su retenir ceux qui étaient venus chercher à vivre au lendemain de la guerre. D’une façon générale, sociétés privées et associations comme gouvernement ne favorisent pas l’immigration : ainsi les étrangers sont-ils exclus de la Ligue Coloniale pour les droits de l’homme, qui cependant a pour simple but de protéger les individus contre les abus de l’administration. Le meilleur moyen de les assimiler d’abord, puis de les franciser, est bien cependant de les attirer dans tous les groupemens qui ne sont pas politiques ; il faudrait même multiplier les associations syndicales, indispensables par ailleurs pour permettre au colon de parer aux ravages de la nature et aux fluctuations des cours en Europe, pour y englober les étrangers. Tout au contraire, le gouvernement se montre extrêmement difficile à accorder la naturalisation pour garder le droit d’expulsion sur le plus grand nombre de gens : on a été jusqu’à la refuser à des Français de Maurice depuis vingt ans dans l’île, mariés à des Françaises et jouissant de la considération publique, parce qu’ils avaient écrit des articles désagréables pour des fonctionnaires.

La crainte du séparatisme hante toujours les législateurs français, mais ils y travaillent beaucoup plus en imposant à nos nationaux frondeurs des colonies des tarifs écrasans qu’en permettant aux étrangers de s’établir à demeure. Il importe même d’attirer le plus de nationalités différentes pour équilibrer leurs disparates et régner sur leur confusion. Dans les conditions actuelles, une colonisation est nécessairement une œuvre de collaboration. Sans doute il ne peut être question d’arriver à peupler un pays lointain comme Madagascar de la même façon que les Etats-Unis, ce qui impliquerait d’ailleurs l’extermination de l’indigène : ceux qui doivent naturellement coopérer à coloniser la Grande Ile australe, ce sont les tributaires de la mer qui la baigne, les Chinois (par l’Indo-Chine), ces descendans des ancêtres des Hovas, les Javanais, qui immigrent déjà dans plusieurs pays, les Indiens qui ont essaimé par tout le pourtour de l’océan Indien, les Arabes, les Çomalis, qui sur de simples boutres arrivent à Diego et à Majunga, les Zanzibarites et les Africains qui fuient le Damaraland, les Maquouas agriculteurs du Mozambique, très nombreux dans le nord-ouest. Peuplement noir, grouillant et pacifique, qui ne songera de longtemps à