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contre-coup de ces troubles, car elles se maintenaient, en 1904, 1905 et 1906, à 81 pour 100 des exportations totales. Sur 173 vaisseaux ayant touché ce port en 1906, 155 étaient anglais et 10 russes.

Dans le golfe Persique même, les Anglais avaient à peu près monopolisé à leur profit le mouvement commercial. Entre le détroit d’Ormuz et l’embouchure du Chatt-el-Arab, quarante navires contre un étaient anglais. Sur un total de 71 125 000 francs représentant la valeur des importations du golfe Persique en 1900, 62 675 000 francs représentaient la part du commerce anglo-indien, et la proportion était la même pour le chiffre des exportations qui s’élevaient à 52 175 000 francs. Deux fois par mois, des paquebots partaient d’Angleterre à destination du golfe, qui était en outre mis en communication avec Bombay par une ligne de navigation. Une bonne partie du littoral avait été placée sous l’influence politique de l’Angleterre. Sur la côte arabique, cette puissance avait fait accepter son protectorat à la petite république de Koweït, non loin de l’embouchure du Chatt-el-Arab, occupé plus au Sud les îles Bahréïn, signé des traités politiques avec les chefs des tribus de la côte des Pirates, depuis la partie du littoral à hauteur des îles Bahréïn jusqu’au cap Masandam qui commande l’entrée du détroit d’Ormuz. Elle tenait sous sa dépendance l’État d’Oman dont elle pensionnait le Sultan. Sur la rive persane, de l’autre côté du golfe, elle s’était installée à Gualior et avait mis une garnison de cipayes de l’Inde à Djask, à l’entrée du détroit d’Ormuz. Pour surveiller le commerce et pour assurer la domination de l’Angleterre, cinq résidens politiques étaient fixés à Mascate, Koweït, Bender-Abbas, Bahréïn, Boushire. Le plus élevé d’entre eux, celui de Boushire, vrai maître dans ces parages, était appelé « le roi du golfe Persique » par les riverains : le golfe lui-même était considéré comme un lac anglais.

En somme, et quoi qu’on en ait dit, des deux puissances en lutte en Asie, c’est l’Angleterre, et non la Russie qui, depuis un siècle, avait déployé le plus d’efforts pour s’assurer cette hégémonie et accaparer le plus de peuples et de royaumes. Partie du cours moyen du Gange au commencement du siècle dernier, elle s’était élevée progressivement vers le Nord, s’emparant de tout le cours du Gange et des hautes vallées de l’Indus. Elle avait soumis le Cachemire et, franchissant les crêtes