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continuer sa route pour Saumur ; nous n’en avons pas moins ajourné la distribution de son journal dans notre département ; nous n’en avons pas moins arrêté nous-mêmes son protégé Quétineau, et sa bonne amie femme Quétineau ; nous n’en avons pas moins rejeté avec horreur la proposition qu’il nous fit, la veille de la prise de Saumur, d’envoyer à Paris une force départementale. En vain Ronsin a-t-il cherché à nous perdre dans l’esprit du militaire, nous avons été justes envers tous. Nous avons arrêté les chefs de la Légion Germanique qui voulaient aller grossir la Vendée ; nous avons fait fabriquer à Tours pour plus de quatre millions d’habillemens et d’équipemens pour nos frères qui venaient au secours des départemens troublés ; nous avons, en qualité de Commissaires civils, marché nous-mêmes contre les brigands à la tête de nos bataillons, et nous n’avons cessé de dénoncer Ronsin et tous les propagateurs de la guerre de Vendée. Qu’est-il résulté de tous ces événemens ? La plupart des députés de la Convention, qui ont su apprécier notre amour pour la liberté, nous ont rendu une justice éclatante ; la plupart des chefs militaires nous ont également rendu justice. »

On sent tout l’intérêt de ces deux documens. Ils montrent les embarras avec lesquels les membres du Comité de Défense se trouvaient aux prises, et les persécutions auxquelles leur patriotisme même les exposait. Embarras, persécutions n’arrêtaient pas Clément de Ris. En tout, partout, il fut à la hauteur de son rôle, et mérita que, plus tard, on lui rendît cet hommage officiel que « durant toute l’année 1793 il avait été l’âme, de la défense républicaine dans le département[1]. »

Si pénibles d’ailleurs qu’elles fussent, ses fonctions au Comité de Défense avaient la compensation de certains avantages. Le principal fut de le mettre en relations suivies avec plusieurs des Représentans en mission dans la région, notamment avec Tallien, Goupilleau de Fontenay, Guimberteau et Garnier de Saintes. A le voir de près, ils reconnurent et apprécièrent en lui

  1. Non seulement, Clément de Ris avait payé de sa personne, payé de son argent, — car il avait fait en armes, en blé, en avoine, en argent, de nombreux dons patriotiques, — mais il avait instruit les siens à se joindre à lui et à montrer l’exemple de l’abnégation et du courage. C’est ainsi qu’à deux reprises, on vit son fils Ange enrôlé, bien qu’il eût à peine treize ans et demi, dans les rangs de la garde nationale, marcher contre les Vendéens. Exemple d’autant plus louable que l’enfant était de santé délicate et peu faite pour de pareilles fatigues. Mais l’ardeur de son tempérament et son enthousiasme pour la Révolution soutenaient ses forces comme ils avaient inspiré sa conduite.