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oublier, c’est là l’expression même de Nemours il y a deux ans. Il était impossible d’être plus sage et plus prudent qu’il ne l’était alors, mais je crois que depuis on l’est moins. La candidature de Joinville constituait à tous les points de vue une imprudence et a poussé Louis-Napoléon à prendre un parti extrême. Nemours m’a également dit l’année dernière qu’ils n’étaient pas du tout opposés à une fusion, mais qu’ils ne pouvaient pas disposer de la France, à moins que la nation ne leur demandât de le faire. Je voudrais que vous leur conseilliez d’être très circonspects et silencieux, car toutes les fautes des autres tourneront à leur avantage. En fait, il ne peut rien advenir de bon pour eux jusqu’à ce que Paris soit d’âge à être son propre maître, à moins que tous ne rentrent sous les ordres d’Henri V ; mais je crois qu’une régence pour Paris n’est pas possible…


La reine Victoria au roi des Belges.


Château de Windsor, 20 janvier 1852.

Mon très cher oncle,

… Vous pouvez être certain que nous nous tiendrons sur nos gardes comme nous le devons. Nous tâcherons de demeurer dans les meilleurs termes avec le Président, qui est très impressionnable et très susceptible ; mais je dois dire que je n’ai jamais éprouvé la moindre animosité personnelle à son égard, Je crois qu’au contraire nous lui devons beaucoup, car en 1849 et en 1850 il a certainement tiré le gouvernement français de la boue. Mais je suis peinée de l’oppression et de la tyrannie qu’il fait peser sur la France depuis le coup d’Etat : elles créent un état d’incertitude générale, car bien que je croie que ni ses propres désirs ni sa ligne politique ne le poussent à la guerre, il peut cependant y être entraîné.

Votre situation est particulièrement délicate, mais je le répète encore, il n’y a à mon avis aucune raison de s’alarmer…


La reine Victoria au roi des Belges.


Buckingham Palace, 3 février 1852.

Mon très cher oncle,

… Avec un homme aussi extraordinaire que Louis-Napoléon, on ne peut pas se sentir un seul moment en sécurité. J’en suis