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la généreuse assistance qu’elle nous a donnée, à moi et à tous les miens, et que la Providence vient de couvrir d’un succès complet, puisque j’apprends qu’ils sont tous à présent sur la terre hospitalière de l’Angleterre.

Ce n’est plus, Madame, que le comte de Neuilly qui, se rappelant vos anciennes bontés, vient chercher, sous ces auspices, un asile et une retraite paisible et aussi éloignée de tout rapport politique que celle dont il a joui en d’autres temps, et dont il a toujours précieusement conservé le souvenir.

On me presse tellement pour ne pas manquer le train qui emportera ma lettre, que j’ai à peine le temps de prier Votre Majesté d’être mon interprète auprès du Prince, votre auguste époux.

Ma femme, accablée de fatigue par la vie que nous venons de mener depuis dix jours, écrira un peu plus tard à Votre Majesté. Tout ce qu’elle a pu faire est de tracer quelques mots pour notre bien-aimée Louise, que je recommande à votre bonté. On me presse encore, Madame ; je ne puis que me dire, avec mon vieil attachement pour vous, de Votre Majesté le très affectionné.


La reine des Français à la reine Victoria.


Palais de Buckingham, 3 mars 1848.

Madame,

A peine arrivée dans cette contrée hospitalière, après neuf jours d’une cruelle agonie, mon premier sentiment, après avoir béni la divine Providence, c’est de remercier du fond de mon cœur Votre Majesté, pour les facilités qu’elle a bien voulu nous donner pour venir dans ce pays terminer nos vieux jours dans la tranquillité et l’oubli. Une vive inquiétude me tourmente, c’est d’apprendre le sort de mes enfans chéris, desquels nous avons dû nous séparer. J’ai la confiance qu’ils auront aussi trouvé un appui dans le cœur généreux de Votre Majesté, et qu’ils auront été également sauvés comme leur admirable père, mon premier trésor. Que Dieu vous bénisse, Madame, ainsi que le prince Albert et vos enfans, et vous préserve de malheurs pareils aux nôtres ! C’est le vœu le plus sincère de celle qui se dit, Madame, de Votre Majesté, la toute dévouée.