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les élytres éburnées portent des hiéroglyphes en bronze vert, vole dans les champs calcinés, sans souci de la chaleur écrasante. Le sol brûlant lui est un plaisant séjour. Partout, d’ailleurs, la bestiole agile recherche le voisinage de l’homme, dont la main ameublit le sol où ses larves creusent leurs puits. Elle abonde dans les jardins publics de Colombo, s’enlevant sous les pieds des promeneurs, comme sur la place de Pondichéry, et entre les rails du chemin de fer, à Villapouram. Habitante des plaines, elle fuit la montagne, jamais je ne l’ai observée au-delà de quatre cents mètres d’altitude.

Mais c’est abuser des histoires des bêtes. Au vrai, l’archéologie de Genji devrait seule me retenir pendant ce mois de septembre que je passerai au milieu de ses ruines. Faut-il encore compter avec la maladie ! La plupart de mes hommes sont hors de service et je me traîne avec la dysenterie au travers des décombres, aussi lentement que la grosse vipère zébrée, cette Echis carinata, répandue de l’Egypte au Tranquebar, et dont le venin est à ce point subtil que Cléopâtre choisit ce serpent entre tous pour finir sous ses crochets empoisonnés. Mais les reptiles venimeux ne sont redoutables qu’à qui les excite, et seulement, en règle, quand la retraite leur est coupée. J’ai capturé depuis bien des années des centaines d’ophidiens sans jamais avoir été mordu. C’est peut-être un heureux hasard…

Ma prochaine lettre vous dira comment j’ai gravi le Radjah-Ghiri, et quelle a été ma désolation de voir que l’Archeological Survey, se substituant à moi pendant mon absence de vingt années, avait déblayé le lieu où je méditais d’entreprendre mes fouilles, bouleversé les pierres entassées sous les broussailles et découvert mon trésor.


MAURICE MAINDRON.