complètement annihilé la circulation : mais le gouvernement fédéral a sagement fermé les yeux et renoncé à appliquer un droit qui eût arrêté la multiplication de cet instrument précieux.
D’une façon générale, les banques se sont beaucoup mieux comportées dans la crise actuelle que lors de celle de 1893, de désastreuse mémoire. C’est par centaines que se comptèrent alors les fermetures d’établissemens financiers, tandis qu’aujourd’hui il ne s’agit même pas de dizaines et, sauf une exception, que de banques à très faible envergure. Cela s’explique par le fait que ces établissemens se sont considérablement fortifiés depuis quatorze ans, et participent dans une large mesure à la prospérité générale du pays ; cela s’explique encore par la solidité de l’étalon monétaire américain, solennellement affirmée par la loi de mars 1900, qui a proclamé que l’or était la base du dollar. En 1893 au contraire, on était en pleine crise bimétalliste : les gens de l’Ouest menaient dans le pays et au Sénat une campagne furieuse en faveur du double étalon, c’est-à-dire du libre monnayage de l’argent, et le monde put redouter un moment de voiries États-Unis se mettre à ce régime qui eût ébranlé de façon désastreuse tout l’édifice financier.
Aujourd’hui la sécurité est à peu près complète de ce côté. Mais il faut voir quelle sera la situation de l’industrie et du commerce en 1908. Les effets inévitables de la secousse se sont déjà fait sentir. Comme cela est naturel, les industries de luxe ont souffert en premier. Les acheteurs de diamans, de perles, ont suspendu leurs commandes et cherché à résilier une partie de celles qui étaient déjà faites. Beaucoup d’autres transactions ont été retardées ou ralenties, les usines ont renvoyé des ouvriers par dizaines de mille. Les ports de l’Atlantique sont encombrés de travailleurs européens qui regagnent leur mère patrie. Plusieurs mines de cuivre ont arrêté leurs travaux dans une proportion qui représenterait pour l’année entière une diminution de production de 150 000 tonnes. Tel est en effet le caractère américain : il n’hésite pas devant une mesure radicale, et cette énergie même dans l’adaptation de l’effort à une situation nouvelle permet d’espérer que la maladie se guérira aussi rapidement qu’elle a éclaté.
Un Bostonien des plus intelligens, de la race des Yankees trop peu connus de ce côté-ci de l’Océan, descendant des vieux puritains qui formèrent le premier noyau des États-Unis où ils fondèrent ce qu’on appelle la Nouvelle-Angleterre, m’écrivait