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Valençais, Mahonnais, Siciliens, Napolitains, Maltais, tous ont le catholicisme dans les moelles, tous s’imposeront volontiers des sacrifices pour payer leurs prêtres, mais ils choisiront des prêtres de leur nationalité et de leur langue. A mesure que diminuera, faute de ressources et faute de vocations, le nombre des prêtres français, l’afflux des prêtres étrangers, encouragé par les gouvernemens espagnol et italien, deviendra de plus en plus considérable. Les évêques, quel que soit leur patriotisme, ne pourront plus s’y opposer. Jusqu’à présent, ils réussissaient à grand’peine à suffire aux besoins religieux de toute la population. Les vocations locales étant très peu nombreuses, le clergé se recrutait en France, parmi les jeunes clercs des diocèses les plus favorisés, tels par exemple que l’Aveyron, la Lozère, les départemens pyrénéens. Ces jeunes gens, auxquels le gouvernement accordait le passage gratuit, étaient élevés gratuitement dans les séminaires de la colonie ; devenus prêtres, ils recevaient un traitement supérieur à celui qu’ils auraient touché en France. Cette situation va changer. A supposer même qu’avec les ressources des fidèles, ou avec l’aide du gouvernement pendant dix ans, les évêques puissent encore subvenir aux besoins des paroisses, ils manqueront bientôt de candidats pour remplir les fonctions du ministère. L’effet de la loi de séparation et de la disparition des petits séminaires sera certainement, en France, de diminuer, au moins pendant quelques années, le nombre des jeunes gens aspirant à recevoir les ordres ; les évêques ne pourront donc plus permettre à ceux de leurs diocèses de les quitter pour aller en Algérie. En conscience, les évêques algériens qui ont charge d’âmes, — d’âmes françaises, mais aussi d’âmes espagnoles, italiennes, maltaises, — ne pourront pas s’opposer à la venue de prêtres étrangers. Le clergé français actuel d’Algérie est patriote, modéré, tolérant ; en sera-t-il de même du clergé sicilien ou napolitain, du clergé mallais et surtout du clergé espagnol ? Ne s’y trouvera-t-il pas des prêtres fanatiques, ignorans, qui exciteront leurs ouailles au mépris et à la haine de la France persécutrice et spoliatrice du clergé. En pareil cas, dira-t-on, le gouvernement n’aura qu’à les expulser : la loi lui permet d’expulser les étrangers sans donner de motifs, par simple mesure administrative. Mais comment fera-t-on lorsqu’il s’agira de naturalisés ? Et d’ailleurs, ne voit-on pas de quelles manifestations andalouses ou napolitaines l’expulsion et l’embarquement du prêtre