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Mais presque toutes les productions des artistes naguère encore peu connus sont aujourd’hui célèbres ou répandues et mises à la portée de tous par nos grands éditeurs, qui tiennent à maintenir les qualités de parfaite exécution et d’exquise élégance, dont s’honore la librairie française. Grâce à elles, ses livres continuent de se distinguer de ceux de fabrication étrangère. Cette année, comme à leur ordinaire, ils n’ont pas manqué à la tradition.

Un des manuscrits les plus précieux de la Bibliothèque nationale est le manuscrit qui renferme la traduction des Antiquités judaïques[1]de Josèphe, et que le don, fait en 1906 par le roi Edouard VII, des dix feuillets retrouvés à Windsor, a permis de compléter. Plusieurs artistes travaillèrent à l’enrichir de leurs miniatures et enluminures, et l’on sait que la partie la plus belle des illustrations a pour auteur le peintre tourangeau Jehan Foucquet. A l’heure où tant de merveilles d’art sont dispersées, où l’ancienne France est atteinte dans ce qui a fait sa grandeur et sa force, et jusque dans son patrimoine, formé des trésors de ses églises, de ses monastères et de ses couvens, tandis que l’on s’efforce de faire disparaître tant de témoignages de son passé et de ruiner ses croyances, l’Académie des Inscriptions, par un heureux contraste et dans un geste généreux, a voulu assurer la reproduction de ce magnifique ouvrage. Elle a confié le soin de cette publication à M. le comte Paul Durrieu, que ses études spéciales sur l’art du moyen âge et sur les premiers peintres français, qu’il a mieux fait connaître et dont il a même révélé quelques-uns, sa compétence, son goût et son savoir, désignaient pour cette tâche.

Parmi les auteurs de l’antiquité, dont les œuvres sont restées le plus en vogue au moyen âge, Flavius Josèphe, l’historien de la nation juive, est au premier rang. Né en Judée, à Jérusalem, en l’an 37 de notre ère, à une époque encore très voisine de celle où le Christ a vécu, on s’explique aisément que ses œuvres écrites tout d’abord en grec aient été de bonne heure traduites, et surtout son livre des Antiquités judaïques, qui n’est guère autre chose que l’Histoire Sainte si vénérée dans tout le monde chrétien. Transcrites en latin à partir du VIe siècle, les Antiquités judaïques et la Guêtre des Juifs furent, au moyen âge, maintes fois copiées et recopiées. Mais alors que l’on continuait à répandre le texte latin de Josèphe, il en circulait déjà des versions françaises. La première des « Anciennetés des Juifs selon Josèphe » remonterait, dit M. P. Durrieu, à qui nous empruntons ces détails, au

  1. Plon, Nourrit.