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jeunes gens de parvenir trop aisément et de restreindre la foule des candidats. Comme des arbres plantés très serrés dans une futaie poussent en hauteur pour trouver de l’air et ne pas se laisser dépasser, ces candidats, si nombreux pour des postes si rares, se forcent les uns les autres à la besogne et haussent l’étiage des examens et des concours. Après quoi, engagés dans une « filière, » ils peuvent se reposer.

Pour les jeunes Américains, ce qu’il y a de plus important au collège, ce sont les sports. Ces sports changent quelque peu suivant les classes, mais tiennent toujours le principal rôle dans l’éducation. La gloire de chaque université, ce n’est pas d’avoir, comme nos lycées au concours général de naguère, plus de prix de dissertation ou de version latine que les autres maisons ; mais d’avoir les meilleurs rameurs ou les plus forts joueurs de base-ball. Aussi l’Américain arrive-t-il à la force du poignet ; il apprend peu, néglige les diplômes, d’ailleurs sans importance et facilement délivrés ; la vie se charge de le classer suivant ses mérites.

Parmi tous les emplois qui s’offrent à lui, l’un des moins engageans, au point de vue du salaire, est celui de professeur. Les traitemens pédagogiques ne sont nullement en rapport avec ceux des autres fonctions privées, — les universités américaines sont, on le sait, des organismes indépendans où l’Etat n’a rien à voir. — On y débute, on y demeure longtemps à des taux modestes, et le maximum de ce que le professeur le plus éminent peut obtenir est 25 000 francs à Cambridge, New-Haven, Chicago ou New-York.

Les bibliothèques publiques sont beaucoup mieux agencées que les nôtres ; on a souvent décrit les ingénieux mécanismes par lesquels les livres sont demandés, expédiés et s’en retournent d’eux-mêmes à leurs rayons respectifs, au moyen de rails et de wagonnets qui déposent automatiquement chaque volume à son étage, suivant que l’on a pressé tel ou tel boulon au bureau central. Ces bibliothèques sont éclairées à l’électricité, comme d’ailleurs toutes les bibliothèques de l’univers civilisé. Il n’y a qu’à Paris, à la Nationale, où l’on doit plier bagages aux jours sombres de l’hiver à trois heures de l’après-midi, parce qu’on n’y voit goutte ; aucune lumière autre que celle du soleil n’étant encore admise rue Richelieu, pas même celle des lampes à huile qui se sont pourtant faufilées aux Archives nationales, depuis