qui vont planter leur tente et continuer leur œuvre sous d’autres cieux. Les premiers y cherchent de l’or, les seconds y apportent de l’idéal.
Comme les protestans américains, ces juifs étrangers se divisent en deux catégories : ceux qui le sont de fait, ceux qui le sont seulement de nom. Ce sont les plus nombreux. Les bœufs et les vaches, que « sacrifient » tous les jours, suivant le rite hébraïque, les boucheries géantes de Chicago, ne suffiraient pas à la consommation des Israélites, s’ils étaient attachés exactement aux prescriptions de l’ancienne loi ; et je pense qu’il y en aurait fort peu, parmi les Juifs des Etats-Unis, d’assez conséquens avec eux-mêmes pour voter la mise en croix de Jésus. Dans ce pays de libre prosélytisme, où les religions apparaissent fraternelles et non dominatrices, le prêtre catholique a le champ libre pour rappeler aux Juifs, convaincus ou indifférens, non pas ce qui sépare, mais ce qui unit à eux les « gentils » que nous sommes, devenus par la foi enfans d’Abraham. Rien ne s’oppose à ce que, sur ce sol neuf, l’on se souvienne au XXe siècle du christianisme de Jérusalem, prêché d’abord par des Juifs, premiers disciples de la doctrine, comme ils avaient été les premiers auditeurs de la parole pour laquelle, en témoignage, ils ont les premiers versé leur sang.
Que fera et que sera ce noyau catholique de 13 millions d’individus, au sein de ce peuple impétueux, débordant de vie, religieux sans croyances et qui ne tardera pas à se rendre compte que la possession d’un téléphone, d’un ascenseur vertigineux, d’un car électrique, d’un radiateur à vapeur et d’une baignoire avec savon à discrétion, ne sont pas le but unique de l’existence pour une âme curieuse de ses destinées ? Le catholicisme va-t-il s’effriter, se lézarder à son tour ? Va-t-il s’anémier comme les autres cultes et se dissoudre peu à peu dans cette Babel des confessions religieuses ? Va-t-il, intraitable dans ses dogmes, mais plastique et ondoyant dans ses procédés, gagner du terrain et s’étendre en tache d’huile ; ou, sans perte ni gain, va-t-il se calfeutrer, se cloîtrer dans ses églises, borné à sa clientèle d’origine : Irlandais, Italiens, Canadiens français, Allemands du Rhin ou d’Autriche ? Cette dernière hypothèse est sans doute la moins vraisemblable.
D’abord, le catholicisme américain est très « national. » Ses ouailles s’estiment aussi bons patriotes que n’importe quels de