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du nombre des Européens au nombre des musulmans est de 1 à 7, et il n’est guère probable qu’il se modifie sensiblement ; on a vu, en effet, que l’accroissement de l’élément européen se ralentit, tandis que celui des indigènes musulmans ne faiblit pas : 215 000 âmes d’augmentation, de 1891 à 1896 ; 301 000, de 1896 à 1901 ; 382 000, de 1901 à 1906, ou, en déduisant l’apport des oasis sud-oranaises, soit une cinquantaine de mille âmes, 332 000.

En tenant compte de la marche des dix ou quinze dernières années, on peut penser que, en 1930, quand l’Algérie française aura un siècle d’âge, il s’y trouvera 750 000 à 780 000 habitans d’origine européenne, une centaine de mille Israélites indigènes naturalisés, et environ 5 millions et demi de sujets musulmans. Ces résultats seront très honorables, en ce qui concerne l’établissement de la population européenne en Afrique, et très brillans en ce qui touche le développement de la population indigène. Il serait possible que, ultérieurement, vers le milieu, sinon même vers le second tiers, du siècle en cours, quand les indigènes seront graduellement devenus des ouvriers plus habiles, on arrivât à une sorte de saturation de l’élément européen qui aura bien de la peine à dépasser, sinon même à atteindre, 1 million d’âmes dans notre Algérie ; cette saturation est probable dans un avenir qui ne sera pas indéfiniment différé.

Il était nécessaire d’insister sur ces faits, qui sont peu connus ou mal interprétés. Si, comme colonie de peuplement, l’Algérie n’a pas tenu et ne paraît pas devoir tenir toutes les espérances que l’on a fondées sur elle, il en est tout autrement comme colonie d’exploitation : ici, le succès est très brillant et l’on peut espérer, surtout si nous nous décidons à considérer cette contrée comme le seuil et la porte de l’Afrique Intérieure, que ce succès s’affirmera et se développera de plus en plus. Le commerce extérieur spécial, c’est-à-dire déduction faite du transit, s’est élevé à 639 millions en 1904 et à 612 millions en 1905, la décroissance tenant uniquement à la mévente des vins. C’est environ cent fois plus qu’avant la conquête. Le mouvement maritime dépasse 7 millions et demi de tonnes. Le réseau des chemins de fer, qui comprend actuellement environ 3 500 kilomètres, encaissait, en 1904, une recette brute de 35 millions de francs en chiffres ronds et une recette nette d’environ 11 millions. Depuis lors, le trafic s’est considérablement développé : la recette brute dépassera 40 millions en 1907, et la recette nette atteindra, sans