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sur un savant japonais, M. Omori, venu en Californie pour étudier les causes du tremblement de terre. M, Roosevelt répétait ce qu’il avait déjà dit de l’emploi de toutes les forces de l’Union pour protéger les Japonais, si la police de « Frisco » n’y suffisait pas. Et, au même moment, le discours du vicomte Aoki à la Société américaine asiatique de New- York dénotait de sa part un vif désir de réduire l’incident au minimum. Mais il était aisé de constater qu’aucun résultat n’était acquis, qu’aucun résultat n’était à prévoir. Et tout ce que pouvait le Président, c’était d’obtenir d’un des représentans de la Californie, M. Hayes, qu’il ne déposât pas, au moins momentanément, un bill tendant à restreindre l’immigration japonaise presque aussi sévèrement que l’immigration chinoise.

Loin de s’apaiser, les gens de l’Ouest étaient de plus en plus excités. On signalait à Adler, dans l’État de Washington, au nord de la Californie, des violences commises contre douze Japonais. Près de Tacoma, dans le même État, des sévices analogues étaient constatés. A San Francisco, le Board of Éducation poursuivait son argumentation juridique : il exposait notamment que les écoles réservées aux Japonais, aux Chinois et aux Coréens avaient les mêmes privilèges, les mêmes droits, les mêmes avantages que les autres écoles publiques ; qu’il n’y avait par conséquent pas lieu de parler d’inégalité. Dans les journaux, on dénonçait avec colère les « fortunes excessives » faites par les Japonais depuis le tremblement de terre. Enfin, sur la foi de personnages plus ou moins autorisés, on faisait circuler la nouvelle d’un accord nippo-américain, tendant, d’une part, à régler juridiquement la question des écoles, d’autre part, à restreindre l’immigration japonaise en la dirigeant, non plus sur les Hawaï et la Californie, mais sur la Mandchourie. Ces rumeurs prêtaient au Japon une résignation peu conforme à ses habitudes. Malgré plusieurs démentis, elles persistèrent. Le 7 décembre, le département d’État et le sénateur Bacon, autorisés par le Président, crurent nécessaire d’y couper court. La « Ligue pour l’exclusion des Japonais et des Coréens » convoqua alors un meeting pour protester contre les « grossières insultes » dirigées par M. Roosevelt contre le peuple californien. Elle envisageait de nouvelles interdictions à l’usage des Japonais : celle par exemple de voyager, en chemin de fer et en tramway, dans les mêmes wagons que les blancs. Partout, à