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REVUES ÉTRANGÈRES

LES MODÈLES DE VELASQUEZ

The Court of Philip IV, par Martin Hume, 1 vol. illustré, Londres, 1908.


Tous ceux qui ont eu le bonheur de visiter le Prado de Madrid doivent en avoir emporté, comme moi, une impression assez singulière : l’impression que les heures délicieuses, inoubliables, qu’ils ont passées là se sont passées, à la fois, dans un musée et dans un théâtre. Le musée, ce sont les chefs-d’œuvre de Titien et de Rubens, — deux maîtres dont il est impossible de mesurer pleinement le génie, si on ne les a pas vus à Madrid ; — ce sont l’Annonciation de Fra Angelico, la Mort de la Vierge de Mantegna, le Cardinal et la Vierge à l’Agneau de Raphaël, le Noli me tangere de Corrège, les deux Portraits de Dürer, la Madeleine pénitente de Ribéra et le Saint Basile du Greco, et toutes les gracieuses fantaisies de Murillo et les rêves, voluptueux ou tragiques, de Goya ; c’est une réunion restreinte, mais exquise, de peintures qui ne sauraient prétendre à former un ensemble instructif, mais dont chacune mériterait proprement d’être appelée une « Perle, » — à l’exception, peut-être^ du médiocre tableau d’école raphaëlesque qui porte ce titre. Pas une de ces peintures qui, d’année en année, ne nous reste merveilleusement présente à l’esprit, et dont à jamais notre cœur ne garde le parfum. Mais en même temps que nous nous souvenons d’avoir respiré ces adorables fleurs de beauté, nous avons conscience d’avoir rencontré, au milieu d’elles, dans les salles du musée espagnol, un groupe extraordinaire