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confrères de la Conception, établis en l’église Saint-Gervais à Paris, notent dans leurs archives qu’ils ont une image d’albâtre de Notre-Dame. Parfois, mais trop rarement à notre gré, les registres font mention d’une commande faite à un artiste. Les confrères de la Charité de Saint-Ouen de Pont-Audemer se font sculpter un retable. Ceux de Menneval se font faire un vitrail. Les archives des notaires ont livré et livreront encore beaucoup de contrats passés entre des confréries pieuses et des artistes.

A Marseille, en 1517, la confrérie de Saint-Claude demande au peintre Peson l’histoire de son patron. En 1526, une autre confrérie marseillaise charge Jean de Troyes de peindre un retable de la vie de saint Antoine.

Il serait facile d’accumuler les exemples. Mais à quoi bon ? Il vaudra mieux, je pense, essayer de retrouver quelques-unes des œuvres dont ces vieilles confréries ornèrent nos églises.

L’église Saint-Martin de Laigle conserve dans son bas côté méridional deux grands vitraux du XVIe siècle consacrés à la légende de saint Porcien. Saint Porcien ou saint Pourçain, comme on dit dans le Bourbonnais, son pays d’origine, était un pauvre esclave du VIIe siècle, qui étonna son temps par sa sainteté et ses pouvoirs miraculeux. Quand Thierry III marcha contre l’Auvergne avec son armée, les chefs mérovingiens voulurent voir cet homme extraordinaire, qu’ils admiraient et redoutaient tout à la fois comme quelque dangereux magicien. Le vitrail nous montre donc Porcien, vêtu du sombre habit bénédictin, au milieu de guerriers multicolores. Ils ont le fifre et le tambour. Et l’artiste, pour exprimer l’effroi de ces temps antiques, leur a mis ‘sur la tête ce turban turc, qui alors faisait trembler l’Europe. Mais, au bas de l’un des vitraux, une scène curieuse attire l’attention : une longue procession se déroule. En tête, marche un sonneur de cloche ; puis, voici la bannière, la croix ; enfin, viennent des fidèles qui portent au bout d’un manche de grosses torches de cire. Quelle est cette procession ? C’est celle des confrères de la charité Saint-Porcien, les donateurs du vitrail. Ils ont voulu être peints au-dessous de leur patron, dans le bel appareil qu’ils déployaient le jour de sa fête. Cette charité Saint-Porcien de Laigle remontait à 1318. Elle avait dans ses archives la bulle d’un pape. Elle était riche, généreuse. Elle ne se contenta pas d’offrir à l’église deux verrières. Quand on refit le bas côté méridional, elle y contribua de ses deniers. Sans elle, nous