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des réformes. S’il est vrai, comme on l’annonce, que les Autrichiens aient obtenu la jonction de leur réseau bosniaque avec la ligne de Mitrovitza à Uskub, les Turcs ne pourront plus longtemps refuser d’accorder des concessions compensatrices aux Bulgares et aux Serbes.

A Sofia, le 7 mars prochain, aura lieu l’adjudication de la ligne de Mezdra (au Nord de Sofia) à Vidin, qui va desservir toute une partie de la Principauté encore privée de chemins de fer. Enfin une seconde ligne traversant le Balkan va être entreprise entre Tirnovo et Nova-Zagora par Borouchtitza ; elle desservira le district carbonifère et tracera la voie terrestre la plus courte de Bucharest à Constantinople, si toutefois, comme on l’espère, les négociations engagées pour relier enfin, par un pont sur le Danube, le réseau bulgare au réseau roumain ne tardent pas à aboutir. Tous ces chemins de fer contribueront à rendre plus faciles et plus étroites les relations de la Bulgarie avec le reste du monde, et il est permis d’en attendre un heureux résultat. Les Bulgares ont en effet les défauts de leurs qualités : nationalistes intransigeans, ardens patriotes, ils sont souvent, surtout en affaires, hostiles à tout ce qui vient du dehors ; qu’un étranger cherche à établir chez eux une industrie, une entreprise commerciale dont leur pays profiterait cependant tout le premier, il se heurte à d’étranges mauvaises volontés, qui ne fléchissent qu’au moment où le gouvernement a besoin de faire un emprunt. Il est presque impossible de faire des affaires en Bulgarie si l’on ne se résigne pas à passer par l’entremise d’un intermédiaire ou d’un courtier indigène. Cette tendance à l’exclusivisme s’explique chez un peuple qui vient seulement de secouer le joug étranger, mais elle n’est plus compatible avec l’état de prospérité, de progrès et de force où est aujourd’hui parvenue la Bulgarie.

Pays de petite propriété, pays de bons soldats : dans l’armée, plus encore que partout ailleurs, les Bulgares donnent la preuve de cet esprit de patriotisme et de discipline qui constitue le patrimoine moral de leur race. Ils ont fait leur apprentissage militaire en 1877 et en 1885 ; depuis, le gouvernement a dépensé beaucoup d’argent pour son armée : le prince lui témoigne la sollicitude d’un chef d’Etat qui sait qu’en définitive le sort de son pays peut dépendre, un jour, d’une bataille. Sur le pied de paix, l’armée active compte 53 000 hommes présens sous les