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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 44.djvu/110

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affaires du pays sont entre les mains d’hommes sérieux et respectables, qui n’aventurent en général ni leur fortune ni celle de leurs actionnaires dans des entreprises inconsidérées. Le fait que c’est parmi eux que l’empereur Guillaume II a tout récemment été chercher un ministre des Colonies, et qu’en ce moment on en cite plus d’un qui pourrait être appelé à la succession de M. de Stengel à l’office du Trésor impérial, indique mieux que tout commentaire la supériorité d’intelligence et de caractère qui se rencontre dans ce milieu. Nous avons essayé d’en donner un tableau aussi exact que possible, sans parti pris, en nous efforçant de démêler à travers les agitations et les inquiétudes du présent les élémens durables sur lesquels l’avenir peut se fonder. Il serait puéril de nier la puissance d’une nation nombreuse, disciplinée, appliquée au travail, hardie dans ses conceptions et persévérante dans leur exécution. Ces vertus, qui aident à faire les bonnes armées, font aussi les bons agriculteurs, les bons commerçans, les bons industriels. La qualité générale des affaires allemandes, s’il est permis de s’exprimer ainsi, est donc plutôt rassurante ; nous avons donné assez d’exemples de la façon dont elles sont organisées, pour écarter l’hypothèse, si souvent agitée dans les derniers temps, d’un effondrement général. Les sociétés modernes sont beaucoup trop portées à juger l’ensemble d’une situation économique d’après les cours de la Bourse, et à croire tout perdu parce que les actions des sociétés commerciales ou industrielles baissent. La facilité peut-être excessive avec laquelle toute propriété, on pourrait presque dire toute idée humaine, peut être mise en société anonyme, fait que bien des choses sont aujourd’hui sur le marché, qui jadis restaient aux mains de particuliers, se perpétuaient dans les familles et changeaient rarement de maître. Elles n’avaient pas de valeur vénale, tandis que maintenant, divisées en mille parcelles, émiettées aux mains d’une foule d’actionnaires, elles se transmettent à chaque instant du vendeur à l’acheteur et subissent à chaque minute des fluctuations de prix. Celles-ci sont gouvernées par des motifs propres à chaque entreprise, mais dépendent aussi dans une large mesure de l’état général du marché, de l’abondance ou de la rareté des capitaux. Il peut donc arriver, et il arrive fréquemment que la cote d’actions de sociétés prospères recule violemment sans qu’il faille en conclure que des changemens radicaux se soient produits dans leur situation.