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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 44.djvu/154

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animale, parce que messieurs les membres de la Commission n’avaient pu s’entendre sur un système de traction mécanique. Nottingham, il y a quelques années, payait son charbon à gaz 12 sh. 10 p. alors que la compagnie concessionnaire de Sheffield, dans le même district, ne payait le sien que 9 sh. 11 p. : les fonctionnaires de Nottingham ne savaient pas acheter[1]

Loin d’être facteur de progrès, le municipalisme, — on s’en plaint chez nos voisins, — paralyse le progrès, en paralysant la concurrence. Dans les branches d’industrie où les municipalités ne jouissent pas d’un monopole, il est clair que leur concurrence est désastreuse pour l’initiative privée, qui ne peut lutter à armes égales avec une autorité publique armée de droits supérieurs et ayant à sa disposition ce trésor inépuisable, l’impôt. A Londres, par exemple, où 50 000 maisons ouvrières ont été bâties par les Trusts philanthropiques et les grandes sociétés, le mouvement s’est à peu près arrêté du jour où le Conseil de comté s’est mis à en construire lui-même ; à Birmingham, selon M. Nettlefold, toute maison bâtie par l’administration empêche la construction d’au moins quatre maisons qu’eussent créées les particuliers[2]. A Glasgow, une compagnie privée ayant percé un tunnel sous la Clyde pour le transport des voyageurs, s’est vue en butte à une compétition acharnée de la part de la ville qui organisa, pour la ruiner, un service de passage à traction animale avec tarifs réduits « au point de fuite, » comme on dit en perspective[3]. Cette concurrence municipale devient particulièrement grave et critiquable quand les charges en retombent sur l’impôt, et, par l’impôt, sur les industriels mêmes contre qui elle s’exerce, et que l’industrie privée est ainsi forcée de contribuer aux frais de la guerre qui lui est faite : c’est le cas, en Angleterre, de la plupart des grandes compagnies de chemins de fer qui, surchargées d’impôts locaux, ont dû payer les frais de la création d’un grand nombre de lignes de tramways suburbains, dont l’objet ne pouvait être que de leur enlever des voyageurs[4]. Les villes, d’ailleurs, ont toujours cherché à protéger leurs industries et à

  1. Voyez Boverat, op. cit., p. 171. — Darwin, op. cit., p. 145. — Articles du Times, passim.
  2. Voyez Darwin, op. cit., p. 342. — Boverat, op. cit., p. 323.
  3. Darwin, op. cit., p. 294.
  4. Le London and Northwestern paie des subsides à des lignes de tramways en 46 endroits : par contre, en six mois, il a vu diminuer le nombre de ses voyageurs de 3e classe de 482 000 (Times du 2 septembre 1902).