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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




La situation, au Maroc, ne s’est pas améliorée depuis quelques jours, mais peut-être s’est-elle éclaircie. Ce ne sont pas les déclarations du gouvernement qui nous ont apporté des lumières nouvelles, mais bien les événemens eux-mêmes. Les déclarations du gouvernement ont été singulièrement optimistes. Ceux qui ont entendu M. le ministre de la Guerre répondre au Sénat à M. Gaudin de Villaine, puis M. le ministre des Affaires étrangères et M. le président du Conseil répondre à la Chambre à MM. Jaurès et Emile Constant, ont pu croire que les choses avaient pris une tournure décisive, que les tribus, épouvantées par la vigueur de notre action, se soumettaient à qui mieux mieux, et que bientôt toute la région à l’Est de Casablanca, dans un rayon de quatre-vingt ou de cent kilomètres, serait définitivement pacifiée. En est-il réellement ainsi ? Nous ne voulons rien exagérer. Dans certains pays étrangers, on a parlé d’une défaite que nous aurions subie et qui nous mettrait en danger. Rien de tel n’est arrivé. La vérité est que nous avons fait un effort considérable et que, faute de moyens suffisans, nous n’avons pas complètement atteint le but que nous nous étions proposé. Il faut donc, ou recommencer l’effort dans des conditions plus propres à en assurer le plein succès, ou renoncer au but poursuivi. Nous ne conseillons pas d’adopter ce dernier parti ; notre retraite prendrait aux yeux des Arabes le caractère d’une déroule, et les conséquences en seraient très graves. Mais on commence à se demander dans le public, avec une inquiétude croissante, quel est l’objet véritable des marches et des contremarches auxquelles nous assistons sans les bien comprendre. Le moment est venu de savoir exactement ce que nous voulons faire, et de proportionner nos forces à l’exécution de nos desseins.