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même les injures qui lui furent prodiguées. A quoi bon rappeler tout le détail de cette polémique, dont les derniers échos ne sont pas encore apaisés ? Chacun s’entendit à faire de la publication de ce simple article un événement intellectuel aussi considérable que le fut, trente ans auparavant, l’apparition de la Vie de Jésus. « J’ai fini par me persuader, déclarait l’auteur, que j’y avais dit des choses bien plus intéressantes que je ne croyais moi-même. » Et incapable qu’il était d’ailleurs de s’en tenir à la position nécessairement un peu inconsistante et provisoire qu’il avait prise tout d’abord, il entama dès lors une série d’articles ou de conférences qui, tous ou toutes, constituent comme les étapes successives d’une lente évolution religieuse dont le terme préfix était, — chose facile à prévoir, — l’adhésion définitive au catholicisme. Il mit cinq ans à faire les derniers pas. Très simplement, dans une réunion intime qui suivit une conférence prononcée à Besançon, le 25 février 1900, sur Ce que l’on apprend à l’école de Bossuet, il déclara que le « seuil du temple » était franchi :


Pour combattre ces doctrines [le Dilettantisme, l’Individualisme et l’Internationalisme], j’ai cherché un point d’appui, et après l’avoir inutilement cherché dans les leçons de la science ou de la philosophie, je l’ai trouvé, et je ne l’ai trouvé que dans le catholicisme. Oui, je n’ai trouvé qu’en lui l’aide et le secours dont nous avons besoin contre l’individualisme. C’est à la lumière de ses enseignemens que j’ai compris toute la vanité du dilettantisme. Et j’ai compris aussi, à voir, dans le présent et dans le passé, comment le catholicisme et la grandeur de la France étaient inséparables l’un de l’autre, que nous n’avions pas de plus sûre protection, ni d’arme plus efficace contre les progrès de cet internationalisme dont vous parliez tout à l’heure. Indépendamment de toute idée personnelle, ce sont là des faits certains, ce sont des vérités qui s’imposent, et du jour où l’évidence m’en est entièrement apparue, c’est de ce jour que je me suis déclaré catholique.

J’ajouterai ce soir que tout ce que j’ai vu depuis lors, toutes les épreuves que nous avons traversées m’ont affermi dans cette conviction. Ni dans les laboratoires, ni dans les systèmes, ni dans la vie de tous les jours, je n’ai rien découvert, on ne m’a rien montré qui l’ébranlât. Si j’y suis venu, j’ai l’espérance que d’autres y viendront. Et, Messieurs, puisque j’ai l’honneur de me retrouver une fois de plus au milieu de vous, je suis heureux, et il m’est doux que d’une évolution commencée à Besançon, voilà tantôt quatre ans, ce soit à Besançon, que j’aie trouvé le terme[1].


On s’est souvent étonné que, dès le 1er janvier 1895,

  1. Bossuet et Brunetière, Besançon, Bossanne, 1900, p. 36-37.