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chantaient de loin, ne me parussent plus, à dix pas, aussi extraordinaires.

Après la sieste, j’allais fréquemment au Zappion, où je pouvais tout à mon aise le regarder et prolonger fort tard la jouissance du spectacle.

Le Zappion proprement dit est une grande bâtisse de style néo-grec, qui sert de lieu d’exposition permanent. On l’appelle ainsi du nom de ses fondateurs, les frères Zappas, qui méritent, de ce chef, une place d’honneur parmi les évergètes de la moderne Hellade. Ce n’est pas que ce palais de l’Industrie, dont ils ont fait cadeau à leurs compatriotes, soit précisément une merveille architecturale. Pourtant, c’est un des mieux réussis d’Athènes. Mais, autour de ce palais, il y a un jardin public qui est fort agréable en été et qui est charmant par ses perspectives sur la campagne et sur la ville. Je concède que les ombrages en sont médiocres, les plates-bandes assez pauvrement fleuries et qu’il y a de-ci de-là, des statues à faire frémir (il en est de françaises dans le nombre). Quand on a envie de se reposer et que la chaleur est accablante, on ne prend pas garde à tout cela. On bénit la reine Amélie d’avoir donné le bon exemple à ses sujets, en plantant quelques arbres derrière le Palais-Royal et commencé, pour ainsi dire, ce jardin. On s’installe à l’angle du Zappion, sur la terrasse où sont les cafés, — et l’on se délecte de la vue admirable.

En face, il y a bien une échappée assez laide sur la route de Phalère, mais on a l’Hymette à sa droite, — l’Hymette qui, à cette heure-là, est complètement rose, d’un rose vif et cristallin de groseilles fraîches. Au pied, c’est le lit à demi desséché de l’Ilissos, et, sur la berge opposée, une butte maigre, d’un brun argileux, où de petites maisons blanches, rouges, violettes, papillotent avec la même crudité de tons que dans une toile impressionniste espagnole. Sur ce fond rude et clair, les colonnes du temple de Jupiter Olympien éclatent en un relief prodigieux. Elles sont habituellement d’un jaune orange, qui, maintenant, luit de reflets métalliques, et les acanthes colossales des chapiteaux se recourbent comme de longues palmes dorées.

Mais, à gauche, une chose déconcertante attire les yeux tout de suite. Au bout d’une allée de square, entre une double rangée de lampadaires à gaz, le bastion oriental de l’Acropole dévale d’un jet perpendiculaire parmi des entassemens de roches.