disposition d’esprit où Shakspeare nous représente le bouillant Percy, qui, après avoir tué une demi-douzaine d’Écossais, se plaint de ce que la vie est ennuyeuse : — il ne se passe rien en ce moment, remplissons un peu le vide de l’existence ! — L’orateur a déclaré avec une grande assurance qu’à ses yeux l’accession de Bade devait commencer l’achèvement de la Confédération. Messieurs, je ne puis ici qu’opposer conviction à conviction. La mienne est que cette accession serait au contraire une entrave à l’achèvement, — non pas seulement une entrave qui commencerait à nous arrêter, mais un véritable enrayement de nos roues qui, assez longtemps, nous empêcherait de travailler à l’achèvement de l’État fédéral. »
Bismarck répondit encore à Miquel, qui l’avait accusé de renvoyer l’unité de l’Allemagne aux calendes grecques, que son but était le même que le sien, et qu’entre eux, la différence n’existait que sur l’emploi des moyens. « Ces messieurs sont d’avis qu’ils s’entendent mieux que moi à les choisir et à juger la question d’opportunité, et moi je pense m’y entendre mieux qu’eux. Si vous entendez mieux la question, vous devez être vous-même chancelier fédéral ; il ne faut plus en ce cas que vous siégiez à la place où vous êtes, car ce n’est pas de cette place, mais de celle où je suis, que se dirige la politique publique de l’Allemagne ; si donc vous savez tout mieux que moi, venez vous asseoir ici, j’irai, moi, siéger à votre place, et, là, je veux exercer la critique dont une expérience de vingt ans peut m’avoir pourvu. (Bruyante hilarité.) Mais je vous assure que mon patriotisme m’imposera silence, quand je sentirai qu’il est intempestif de parler. » (Vifs applaudissemens.) Lasker, considérant que ses amis et lui avaient suffisamment atteint leur but, annonça qu’il retirait sa motion (24 février).
Le lendemain le Roi écrivit à Bismarck[1] : « J’ai lu très attentivement, et j’approuve complètement votre discours et vos répliques ; mais il faut les lire complètement, car quelques passages, extraits à la Miquel, pourraient être très faussement interprétés. » Il faisait allusion à la sortie contre le grand-duc de Bade. Il n’avait pas tort d’en concevoir quelque inquiétude. Le grand-duc et ses ministres manifestèrent une véritable colère, et les relations amicales entre les deux gouvernemens parurent
- ↑ Lettre du 26 février.