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pour ainsi dire, les indigènes, et ne contenait aucune disposition en leur faveur. On a tenu compte de cette observation en instituant une commission permanente de sept membres chargée de veiller sur tout le territoire de la colonie, à la protection des noirs et à l’amélioration de leurs conditions morales et matérielles d’existence. « Des lois régleront, à bref délai, en ce qui les concerne, les droits réels et la liberté individuelle. »

En somme, cette législation coloniale prête peu le flanc aux critiques, mais, ainsi qu’il fallait s’y attendre, elle est loin de satisfaire les adversaires irréductibles tant à Londres qu’à Bruxelles. Tandis que le Congo Reform Association, par la plume virulente de M. Morel, continue à fulminer de plus belle contre l’administration congolaise, le gouvernement belge est occupé à négocier, avec l’Angleterre et les Etats-Unis, qui exigent des garanties en faveur de la liberté commerciale et des intérêts des nègres. A Bruxelles, les débats ouverts, le mois dernier, devant le Parlement, ont amené, d’abord, une tentative d’obstruction de la part de l’extrême gauche. Celle-ci, voyant que la majorité paraissait acquise au projet, prétendit que le gouvernement voulait étrangler la discussion et faire voter l’annexion précipitamment avant les élections législatives du 24 mai, et elle chercha sans succès à obtenir que le pays fût consulté, au moyen d’un référendum. M. Schollaërt, dans son discours du 24 avril, a désarmé ses adversaires en déclarant que le gouvernement, loin de vouloir escamoter le vote, désirait que « le débat eût toute son ampleur. » Le programme du chef du Cabinet, au sujet de l’administration de la future colonie, mérite d’être loué sans réserves :


Nous devons, a-t-il dit, nous efforcer d’assurer aux populations plus de bien-être ; répandre et généraliser l’emploi de la monnaie et arriver ainsi à établir le payement de l’impôt en argent. Nous devons tendre à supprimer le travail forcé ; continuer les efforts déjà tentés pour diminuer les corvées, surtout celle du portage. Nous devons, par de très larges et très généreuses concessions de terres, étendre les propriétés des indigènes. Nous devons aussi leur assurer bonne et prompte justice, intègre, impartiale, éclairée et suffisamment nombreuse. Nous sommes enfin fermement décidés à remplir scrupuleusement toutes les obligations qui résultent pour nous des conventions, et notamment du traité de Berlin.


Un tel programme, s’il est loyalement appliqué, comme le veut M. Schollaërt, semble de nature à rallier les suffrages de