certaines places situées sur les confins du Dauphiné et de la Savoie à la possession desquelles il tenait particulièrement, car les passages des Alpes en dépendaient, entre autres Exilles et Fenestrelles. Mais la Savoie et le comté de Nice n’avaient presque jamais cessé d’être occupés par les troupes de l’armée royale. Les incursions qu’il avait personnellement dirigées sur le territoire de la France n’avaient pas été heureuses. La vigoureuse résistance de Tessé l’avait, en 1707, arrêté devant Toulon, et cette tentative d’invasion de la France par la Provence n’avait pas mieux réussi que, deux siècles auparavant, celle de Charles-Quint. Victor-Amédée n’avait donc pas, au cours de cette longue guerre, recueilli cette gloire militaire dont il était avide et à laquelle sa valeur personnelle, poussée jusqu’à la témérité, lui donnait le droit de prétendre. Les convoitises territoriales qu’il nourrissait n’avaient pas, d’un autre côté, reçu satisfaction complète, et son amour-propre n’avait pas davantage été ménagé par son impérial qu’autrefois par son royal allié.
L’empereur Léopold avait bien consenti, » par un traité signé à Turin le 8 novembre 1703, à lui concéder les provinces d’Alexandrie et de Valence et la partie du Montferrat possédée par le duc de Mantoue. Mais c’était le Milanais tout entier qu’ambitionnait Victor-Amédée, et la pensée que Milan et le reste de la Lombardie demeureraient en la possession de l’Empereur le remplissait d’inquiétude. Il ne se souciait pas d’avoir un aussi puissant voisin. Maladroitement aussi Léopold blessa son nouvel allié en soulevant quelques difficultés à propos de l’investiture du Montferrat qui faisait de Victor-Amédée un vassal de l’Empire. L’orgueil de la victoire lui fit même, tout comme il arriva souvent à Louis XIV, commettre une faute plus grave qui faillit tourner contre lui. Le royaume de Naples et les Présides[1] de Toscane étant tombés entre les mains de l’armée impériale, Léopold crut le moment favorable pour publier un décret par lequel il déclarait vouloir faire revivre les droits de l’Empire sur toute la péninsule. Tous les princes italiens auraient été considérés comme des vassaux de l’Empire et toutes les Républiques menacées dans leur indépendance. Le mécontentement en Italie était général, et Victor-Amédée, en particulier, ne cachait pas le sien. Aussi commençait-il à s’agiter
- ↑ On appelait Présides les ports de mer de la Toscane qui assuraient ses relations maritimes avec l’Espagne.