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année, que le gouverneur radjpoute du nouveau Genji, Tej-Sing, — le Desing de la Ballade, — fut tué dans une bataille qu’il livra au Nabab d’Arcot, Sadatulla-Khan.

L’aventure de Tej-Sing est peu importante en soi. Il ne fut certes pas le premier radjpoute qui refusa de payer le tribut entre les mains d’un officier du Grand Mogol. Mais cet obscur gouverneur devint un type représentatif du patriotisme, ou, pour mieux dire, de l’indépendance féodale des tchatrias brahmanistes contre le vieil envahisseur musulman. Toute l’histoire du Carnate, ou plutôt de l’Inde dravidienne en son entier, est dans cette guerre séculaire entre Hindous et Maures. Aussi loin qu’on se reporte dans l’obscure chronologie de la région, apparaît cette notion première qui s’éclaire, au XVIe siècle, par la certitude des faits. La puissante maison de Vijianagar succombe en 1565 sous les efforts combinés des souverains islamites de Golconde, Bijapour, Ahmednagar et Bedar. Sur le champ de bataille de Palikota se décida le sort du pays situé entre le Kistna et le Godavéry.

La légende veut que l’usurpateur Rama Radjah y ait trouvé la fin de sa carrière et de ses forfaits. Pris pendant le combat, il aurait été mis à mort par les vainqueurs. Sa tête, macérée dans l’huile de santal et peinte en rouge, serait restée exposée dans la ville de Bijapour pendant tout un siècle. Ainsi fut puni Rama Radjah pour avoir dépossédé son souverain le jeune Sadaciva, et occupé contre tout droit le trône de Vijianagar.

Le prince légitime fut heureux de conserver, après la défaite, un pouvoir nominal sur les territoires de Madura, de Tanjore et de Genji que lui disputèrent par la suite les Najakas ou vice-rois de ces deux derniers districts, alliés avec le fameux Tiroumale-Najaka de Madura. Pour comble d’infortune, le malheureux souverain de Vijianagar dut appeler à son secours ses anciens ennemis. Vers la même époque, à un autre bout du monde, Henri III de Valois, réduit aux pareilles extrémités par les ligueurs parisiens à la solde de l’Espagne, requérait l’assistance d’Henri de Navarre. Les musulmans de Golconde ne se firent point faute d’intervenir. Ils commencèrent contre les Najakas du Mysore, du Deccan et du Carnate ces campagnes de sièges qui devaient durer près d’un siècle. Genji est investi par les contingens de Golconde, sans succès. Ceux de Bijapour reprennent les opérations. Alors apparaît Shadji, père du fameux Sivadji.