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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/230

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Après de longues et de laborieuses séances où la question a été examinée sous toutes ses faces, le Sénat a voté le rachat de la Compagnie de l’Ouest. Nous ne l’en félicitons pas, car il a certainement voté contre sa conviction intime, c’est-à-dire contre sa conscience. S’il avait été libre, il n’aurait pas donné soixante voix au rachat ; mais il n’a pas eu le courage de l’être. La question de confiance posée par le ministère a pesé lourdement sur son vote : plutôt que de renverser le Cabinet, il a sacrifié, ou du moins compromis un des élémens principaux de la fortune nationale. Le gouvernement n’a d’ailleurs pas à se glorifier beaucoup d’une victoire qu’il n’a remportée qu’à une faible majorité et qui même, à un moment, a failli se changer pour lui en déroute. La vérification d’un scrutin a donné lieu à un pointage pendant lequel on a cru le ministère perdu ; puis il a été sauvé par trois voix de majorité ; enfin, le lendemain, à la suite de rectifications individuelles, ces trois voix se sont changées en une quinzaine. Mais le gouvernement avait senti passer le souffle de la mort, et finalement il a transigé avec la Commission sur un texte qui ressemble un peu à une équivoque. Le rachat est voté : reste à savoir quand et comment il sera effectué.

Il y a quinze jours, après avoir rendu compte de la première partie de la discussion du projet de rachat, nous en étions resté au discours du rapporteur de la Commission, M. Prévet, et à l’effet très profond qu’il avait produit sur l’assemblée. Alors s’est produit, en dehors du débat, un fait qui devait exercer sur lui une influence considérable. M. le ministre des Travaux publics avait déclaré que, s’il croyait possible le succès de négociations avec les compagnies de chemin de fer, il n’hésiterait pas à en prendre l’initiative : seulement il n’y croyait pas, il ne pouvait pas, il ne voulait pas y croire,